En droit constitutionnel français, une dĂ©claration de politique gĂ©nĂ©rale est un acte par lequel le Premier ministre engage la responsabilitĂ© du gouvernement devant l’AssemblĂ©e nationale ou bien demande une approbation au SĂ©nat, en prĂ©sentant son programme de gouvernement. Sous la Ve RĂ©publique, l’usage veut que, aprĂšs leur nomination, les Premiers ministres se prĂ©sentent devant les dĂ©putĂ©s et les sĂ©nateurs pour exposer de maniĂšre solennelle les grands axes de leurs programmes de gouvernement et les principales mesures qu’ils souhaitent mettre en oeuvre (art. 50-1 de la constitution). En revanche, le Gouvernement nâest pas dans lâobligation de solliciter la confiance du Parlement. Mme Borne, comme certains de ses lointains prĂ©dĂ©cesseurs, dont le plus emblĂ©matique est sans doute Michel Rocard, nâayant pas de majoritĂ© absolue, nâa pas engagĂ© la responsabilitĂ© de son gouvernement comme peut le permettre lâarticle 49-1 de notre constitution.
Elle a rappelĂ© quelques grands principes dâaction, a insistĂ© au niveau de la mĂ©thode sur la nĂ©cessaire concertation et nâa guĂšre rassurĂ© quant au non moins nĂ©cessaire redressement de nos comptes publics. Chacun portera le regard quâil souhaite sur sa dĂ©claration. Je me fĂ©licite quâelle ait soulignĂ© la place et lâimportance du SĂ©nat dans lâĂ©quilibre de nos institutions.
Ce discours sâinscrit dans un contexte qui nous oblige et nous engage, notamment pour garantir notre souverainetĂ© et assurer la transition Ă©cologique, mais aussi pour faire face Ă la situation internationale que nous connaissons. Que retenir de ce discours?
Pour ma part, jâai voulu vous faire partager
thĂšmes majeurs qui en ressortent.
Les mots « ensemble », « bĂątir », « compromis », « concertation », « crĂ©ation de commissions transpartisanes »⊠ont Ă©tĂ© les plus utilisĂ©s dans le discours de la PremiĂšre Ministre. Il sâagissait donc de montrer la volontĂ© dâĂ©couter, de concerter, de travailler avec les corps intermĂ©diaires, les Ă©lus locaux, les oppositions constructivesâŠ. Montrant par lĂ , la volontĂ© de changer de methode, peut-ĂȘtre sous la contrainte du moment, par rapport au prĂ©cĂ©dent quinquennat qui fut trĂšs vertical, Mme Borne a laissĂ© entendre que sa porte Ă©tait ouverte. A voir si la rĂ©alitĂ© de lâaction correspondra Ă cet appel, mais saisissons la main tendue pour la France et les Français si elle peut ĂȘtre saisie sans se renier et au contraire pour rĂ©pondre aux attentes dans le respect des valeurs et dâun corpus programmatique. Nous verrons vite si cette invite est rĂ©elle et sincĂšre. La perspective du retour du Conseiler territorial, sur laquelle je me suis rĂ©cemment positionnĂ© (voir article du Journal des dĂ©partements), a Ă©tĂ© Ă©voquĂ©e et une commission transpartisane sur les institutions va y travailler.
Les principaux engagements pris par la PremiĂšre Ministre sont les suivants:
Deux vĂ©ritables annonces nouvelles, mĂȘme si elles Ă©taient dâautant plus attendues que pour la premiĂšre elle est inĂ©luctable et que pour la seconde elle avait Ă©tĂ© adoptĂ©e par le SĂ©nat et que le prĂ©cĂ©dent gouvernement lâavait rejetĂ©e :
Les grands thĂšmes abordĂ©s avec les principales annonces qui sây rapportent sont les suivants :
Parmi ceux-ci, on peut notamment citer :
Pour autant la situation exige de chercher un chemin constructif pour la France et pour les Français.
Il convient toutefois de sâassurer que le gouvernement avance avec sincĂ©ritĂ©, Ă©coute, loyautĂ© et volontarisme. Si tel est le cas, nous saurons, comme nous lâavons toujours fait au SĂ©nat, et comme nous devons le faire aujourdâhui plus encore, sans compromission mais avec fermetĂ©, ĂȘtre constructif et exigeant, nous saurons chercher lâapaisement sans reniement.
LâidĂ©al serait dans ce cadre de bĂątir une feuille de route autour dâun corpus indiquant clairement nos lignes rouges dâune part et nos 10 prioritĂ©s fortes que lâon veut voir aboutir dâautre part, au premier rang desquelles lâinstauration de rĂ©ponses diffĂ©renciĂ©es pour nos territoires ruraux et la lisibilitĂ© financiĂšre pour nos communes.
« Le Sénat ne dit jamais oui par discipline et jamais non par dogmatisme », comme aime à le rappeler
GĂ©rard Larcher.
« BĂątir ensemble », tel est le message essentiel dĂ©livrĂ© par Elisabeth Borne, souhaitons que les actes suivent les engagements. Faisons-en le pari, sans nous trahir, pour Ă©viter une crise politique, des clivages et des fractures accrus, pour rĂ©parer la sociĂ©tĂ© française, pour relier les français, dans une opposition « dâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral », en dĂ©bureaucratisant, en sortant de la communication pour revenir Ă la politique et en Ă©coutant le peuple.
« Lâhonneur de la politique câest la force des convictions », a rappelĂ© Bruno Retailleau.
En fait câest une question de courage !