Retour des Talibans au pouvoir en Afghanistan : un tournant dans l’ordre mondial.

25 août 2021
🌏 Nous venons de vivre un événement historique qui nous ramène 20 ans en arrière et interroge sur notre impuissance. La décision des États-Unis de se retirer d’Afghanistan et l’échec total d’une transition démocratique interne au pays, ouvrent la voie non seulement à un véritable péril pour les Afghans, mais aussi à un retour d’un terrorisme islamique d’Etat présentant un danger pour tout le monde occidental. En effet, et malgré les négociations de Doha conduites entre américains et talibans, le terrorisme fait partie de l’ADN des talibans qui ont gardé des liens amicaux, voire familiaux avec Al Qaida. Cet épisode nous interroge encore une fois sur le rapport entre l’Islam et la modernité comme l’historien Bernard Lewis le faisait déjà avant l’attentat des Twin Towers en 2001. Que s’est-il passé pour que tout aille si mal aujourd’hui encore ?
🌏 Beaucoup d’analyses ont été faites autour de cet événement dont la rapidité et les conséquences immédiates nous frappent : risques pour la population locale, retour brutal en arrière quant à la condition des femmes, mouvements migratoires immédiats, mais aussi facilités accordées par une grande partie de la population locale aux talibans… L’intervention du Président de la République lundi soir montre à la fois notre détermination à venir en aide à nos ressortissants et aux Afghans directement impliqués en appui de la France, mais aussi notre impuissance à agir sur la situation et ses conséquences. La France est restée présente de 2001 à 2014. 70.000 soldats français se sont succédés sur le sol afghan et 89 y ont perdu la vie dont un cantalien. La France a fait son devoir, mais avec quel résultat? La position confirmée du Président Biden quant au retrait des américains montre l’échec du travail de reconstruction d’une puissance étrangère, sous mandat de l’OTAN, jamais vraiment intégrée ni acceptée, victime de la corruption dans les plus hautes sphères du pouvoir comme de l’armée afghane. Formée et financée par les États-Unis à hauteur de 89 milliards d’Euros en 20 ans, l’armée afghane a subi une véritable débâcle. Au total le Pentagone chiffre à 800 milliards de dollars le coût de cette guerre qui s’est finalement écroulée comme un château de carte. Même si ce n’est pas dans les mêmes proportions, nous nous apprêtons d’ailleurs à en faire autant au Sahel, ne pouvant maintenir durablement une force étrangère dans une zone incontrôlable et laissant là aussi la place aux forces terroristes. Les Afghans savaient que, contrairement aux talibans, les occidentaux n’avaient pas vocation à rester. Le temps joue toujours contre nous, ici comme ailleurs.
🌏 Cet épisode brutal d’un retour 20 ans en arrière montre au moins deux éléments que nous ne pouvons plus longtemps ignorer.
1️⃣ Le premier est le déclassement de la France. Il est un fait dans plusieurs domaines : notre niveau d’éducation, notre capacité de recherche et d’innovation, notre puissance industrielle et agricole… Il est patent quant à notre influence dans le monde au niveau diplomatique, comme au niveau militaire. On peut le regretter, il faut surtout le constater et voir comment reconquérir notre rang. Nous n’avons plus les moyens de cette puissance au niveau national et nous ne parvenons pas à le transférer, à l’exercer au niveau européen. Cela nous coûte à tous niveaux : budgétaire car nous maintenons un effort qui est pourtant quasi vain au niveau opérationnel ; humain car nous connaissons des pertes humaines pour lesquelles on peut s’interroger à juste titre sur le sens de l’engagement de nos forces ; diplomatique car qui nous écoute encore vraiment ?
2️⃣ Le second est la recomposition du monde qui s’opère devant nos yeux à une vitesse vertigineuse. Les États Unis poursuivent leur repli, renonçant à jouer encore aux « gendarmes du monde », la Russie reste dans une position affaiblie mais encore souvent essentielle et toujours égoïste, la Turquie est une menace à nos portes, surtout la Chine assure les Talibans aujourd’hui comme d’autres hier de sa neutralité bienveillante. Elle laisse à chacun la liberté de ses choix internes, comme elle veut l’avoir chez elle vis-à-vis des Ouïgours par exemple, à condition qu’il n’exporte pas son action chez elle. Aujourd’hui, notre ennemi, l’islamisme radical a gagné une bataille et notre concurrent la Chine montre son hégémonie avec la fin du multilateralisme. Nous sommes donc bien à un rendez-vous des civilisations, d’un idéal de civilisation
🌍 Face à ces deux défis, l’Europe a le devoir d’exister. Pour se protéger elle-même d’abord, face aux menaces du terrorisme islamiste mais aussi face au chaos migratoire, en assumant des capacités sécuritaires vraiment autonomes. Mais aussi pour rester fidèle à notre idéal de civilisation.
L’Europe doit aussi trouver les armes économiques pour lutter face à la montée en puissance inexorable de la Chine, déjà présente partout dans le monde, y compris dans plusieurs pays européens, avec ses nouvelles routes de la soie.
A quelques mois d’assumer la présidence française de l’Union européenne, nous pouvons montrer le chemin de la puissance et de la paix, et ouvrir une voie nouvelle. Cela ne peut se faire sans unité nationale, sans diagnostic partagé, sans projet commun.
A quelques mois de l’élection présidentielle, il s’agit d’un enjeu majeur.
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