Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification (3DS).

22 juillet 2021
Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification (3DS) de l’action publique locale : le Sénat a modifié le projet de loi en première lecture.
🩸Je ne peux m’empêcher de reprendre ici la citation de Kafka, proposée par mon collègue Claude Malhuret lors des explications de vote de la loi 3DS, dont le ton est toujours juste : « Chaque révolution s’évapore en laissant seulement derrière elle le dépôt d’une nouvelle bureaucratie ». On peut la lire positivement, ce texte étant tout sauf une révolution, mais on peut aussi la lire plus négativement, tant ce texte semble surtout bureaucratique, recentralisateur et un patchwork n’offrant que peu de lisibilité.
🩸Mercredi 21 juillet 2021 donc, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, par 242 voix pour et 92 voix contre. J’ai voté ce texte que j’ai contribué à amender. Étant présenté en procédure accélérée, il n’y aura pas de deuxième lecture après l’examen à l’Assemblée nationale, probablement à l’automne.
🩸Ce texte tend notamment à favoriser la différenciation territoriale, en développant les possibilités de délégation de compétences aux collectivités territoriales et en élargissant le champ d’action du pouvoir réglementaire local. Il vise également à faciliter le recours à la consultation des électeurs dans les décisions publiques locales. Concernant la décentralisation, le projet de loi prévoit d’achever le transfert de certains blocs de compétences et de clarifier la répartition de ces dernières. Ces ajustements de compétences intéressent notamment les domaines de la transition écologique, du logement social, de la cohésion sociale et de la santé. Sur la déconcentration, le texte doit permettre de renforcer les services territoriaux de l’État et leur capacité d’appui aux collectivités territoriales. Le projet de loi comporte enfin des dispositions visant notamment à simplifier le fonctionnement des institutions locales. Solution pour les biens sans maître, expérimentation de la renationalisation du RSA, présence des élus dans la gouvernance des ARS, reconnaissance du droit à l’erreur, avancées sur la SRU, transfert des RN (la RN122 rentre dans ce champ du possible)… présentent de réelles avancées.
🩸Plus largement, les principales avancées du Senat en commission sont les suivantes, sous la responsabilité de nos deux rapporteurs Françoise Gatel et Mathieu Darnaud :
🔺Différenciation :
📍étendre le pouvoir réglementaire local dans plusieurs champs de compétences des collectivités territoriales (art. 2) ;
📍assouplir davantage les mécanismes de délégation de compétences entre collectivités et entre l’État et les collectivités territoriales (art. 3) ;
📍permettre des transferts différenciés de compétences sur le territoire intercommunal, dits « transferts à la carte », afin de mieux tenir compte des possibilités d’action des communes (art. 4) ;
📍autoriser les collectivités territoriales à déroger à des décrets régissant l’exercice de leurs compétences après accord du préfet (art. 46).
🔺Transfert/délégation de compétences :
📍confier aux régions l’exercice de la compétence du service public de l’emploi (art. 3) ;
📍clarifier la répartition des compétences entre collectivités territoriales et leurs groupements en matière de transition écologique (art. 5).
🔺Transfert des routes et lignes ferroviaires :
📍assouplir la procédure permettant aux collectivités territoriales et métropoles de solliciter le transfert à la carte d’autoroutes, routes ou portions de voies du domaine routier national non concédé aux Départements (art. 6) ;
📍allonger la durée de l’expérimentation de la mise à disposition de routes et autoroutes aux régions de cinq à huit ans (art. 7) ;
📍assurer la cohérence et la sécurité du réseau ferré national, grâce à un socle commun de règles applicables aux petites lignes ferroviaires transférées (art. 9).
🔺Transition écologique :
📍renforcer les facultés de délégation de gestion aux régions volontaires des fonds « chaleur » et « économie circulaire » de l’Ademe (art. 12) ;
📍garantir l’attribution d’un siège spécifique aux représentants des EPCI à fiscalité propre au sein du conseil d’administration de l’Ademe (art. 12) ;
📍porter à la moitié de la composition de la commission départementale de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPNAF) la proportion d’élus locaux représentée en son sein (article 12 ter).
🔺Urbanisme et logement :
📍sur-pondérer les logements dits « très sociaux » dans le décompte SRU afin de favoriser la mixité sociale (art. add. après art. 15) ;
📍ne pas autoriser la construction de logements « dits très sociaux » dans les communes comptant déjà plus de 40 % de logements sociaux (art. add. après art. 20) ;
📍permettre aux communes de conduire la procédure de reconnaissance d’état manifeste d’abandon en faveur d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) (art. 27).
🔺Santé, cohésion sociale, éducation :
📍inclure des représentants des groupements de collectivités territoriales dans la composition du conseil d’administration des agences régionales de santé (ARS) (art. 31) ;
📍instaurer la co-présidence du conseil d’administration des ARS par le président de région (art. 31).
🔺Déconcentration :
📍faire du préfet de département le principal attributeur de subventions de l’État, en particulier s’agissant de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) (art. add. après art. 46) ;
📍inscrire dans la loi le principe selon lequel toute décision prise au niveau territorial relève prioritairement du préfet de département (art. add. après art. 46).
🔺Simplification :
📍exempter les collectivités territoriales et les groupements de collectivités territoriales de moins de dix mille habitants de l’obligation de transmettre toutes les informations et données strictement nécessaires pour traiter une demande présentée par le public ou une déclaration transmise par celui-ci en application d’un texte législatif ou règlementaire (art. 50) ;
📍permettre aux maires de recueillir, auprès des administrations qui les détiennent, des informations manquantes dans le cadre de recensements ou de remontées d’informations au profit d’administrations centrales (art. 50).
🩸En séance publique, le Sénat a par ailleurs adopté des amendements tendant à :
🔺Transfert/délégation de compétences :
📍permettre aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de déléguer l’exercice d’une compétence dont ils sont attributaires à une commune, un syndicat de communes ou un syndicat mixte (art. 3) ;
📍évaluer l’opportunité et les bénéfices du transfert aux départements de la compétence médecine scolaire (art. 41 A).
🔺Consultations locales :
📍fixer à 1/10ème au sein des intercommunalités le quorum requis pour la pétition demandant l’inscription à l’ordre du jour de l’organisation d’une consultation au sein d’un EPCI (art. add. après art. 4).
🔺Transition écologique/mobilité :
📍rétablir l’obligation de consultation de la structure de gestion des Parcs naturels régionaux (PNR) lors des procédures d’évaluation environnementale et d’autorisation environnementale des plans et projets (art. add. après art. 14).
🔺Urbanisme/logement :
📍rendre plus progressif le rythme d’entrée dans le régime d’obligation concernant les seuils de logements sociaux (art. 17) ;
📍étendre l’acquisition des biens sans maîtres au bout de 10 ans aux zones de revitalisation rurale (art. 27) ;
📍donner aux maires un droit de veto lorsque l’établissement public de coopération intercommunale tente de diminuer leurs droits à construire (art. add. après art. 30).
🔺Santé, cohésion sociale, éducation :
📍renforcer la participation des usagers dans les conseils territoriaux de santé et dans les contrats locaux de santé (art. add. après art. 31) ;
📍confier aux régions et à l’autorité académique le soin d’effectuer le travail d’identification pluriannuelle des besoins, afin d’améliorer la programmation stratégique des capacités d’accueil dans l’enseignement (art. add. après art. 41 ter).
🔺Déconcentration :
📍renforcer les pouvoirs de la commission départementale des investissements locaux dans le cadre de la procédure d’octroi de la Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et de la seconde part de la Dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) (art. 46 quater) ;
📍prévoir une meilleure représentation des élus locaux au conseil d’administration de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) (art. add. après art. 46 quinquies) et de l’Agence de la transition écologique (Ademe) (article 12) ;
📍associer les maires des communes membres d’un EPCI à fiscalité propre à la signature par celui-ci des projets de convention France Services (art. 49).
🔺Simplification :
📍instituer un droit à l’erreur au bénéfice des collectivités territoriales et de leurs groupements (art. add. après art. 50) ;
📍permettre la tenue par visioconférence de la réunion des assemblées délibérantes des conseils régionaux, départementaux et des établissements publics de coopération intercommunale (art. add. après art. 52) ;
📍étendre aux EPCI à fiscalité propre et à l’ensemble des communes de plus de 20 000 habitants la possibilité de créer une mission d’information et d’évaluation (art. add. après art. 74).
🔺Dispositions diverses :
📍renforcer les attributions des communes d’une communauté de communes ou d’une communauté d’agglomération pour procéder à une scission de l’intercommunalité dont elles sont membres (art. add. après art. 4).
🩸Dès lors que le texte sera adopté dans sa version finale, je ne manquerai de faire une communication complète des avancées qui s’imposeront dans notre nouveau paysage institutionnel. Pour autant, je redis ici que ce texte ne présente que des évolutions limitées et qu’il conviendra après les élections présidentielles de proposer une ambition territoriale re forcée pour davantage d’efficacité et de proximité dans la cadre d’une véritable République des territoires.
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