Conférence interparlementaire à Prague

10 octobre 2022
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🇪🇺🇨🇿🇪🇺 Conférence interparlementaire sur la stabilité, la coordination économique et la gouvernance dans l’Union européenne (conférence « article 13 ») à Prague les 10 et 11 octobre (1).

🇨🇿 La République tchèque préside le Conseil de l’Union européenne du 1er juillet au 31 décembre 2022, à la suite de la présidence française. Ses priorités, présentées le 15 juin, sont :
🔹la relance de l’Union européenne après la guerre en Ukraine ;
🔹la sécurité énergétique et la réduction des dépendances aux énergies fossiles russes ;
🔹le renforcement des capacités européennes de défense et de cybersécurité, en complémentarité avec l’OTAN ;
🔹la résilience stratégique de l’économieeuropéenne ;
🔹la résilience des institutions démocratiques.
🇫🇷 L’objectif de cette conférence est de mesurer l’avancement des orientations qui ont un impact direct sur nos finances publiques nationales et plus encore que notre vie quotidienne.
🏛 Je suis fier et heureux d’y représenter le Parlement français aux côtés du Président de la commission des finances du Sénat Claude Raynal et de mon collègue Sénateur Jean-Marie Mizzon.
Ce rendez-vous, une semaine après la réunion des chefs d’Etat à Prague pour lutter contre l’inflation et à quelques jours du prochain conseil européen, dans le contexte de la guerre russo-ukrainienne que nous connaissons et de la crise inflationniste, revêt une importance particulière.
Par-delà les débats qui vont se tenir et dont je rendrai compte, j’ai voulu d’abord rappeler les grands enjeux de cette conférence.
1️⃣ Les plans nationaux de relance et le renforcement de la résilience économique européenne.
🇪🇺 La facilité pour la reprise et la résilience (FRR) : un dispositif européen innovant et ambitieux.
➡️ Dans un contexte marqué par les conséquences économiques de la crise sanitaire, les 27 Etats membres se sont accordés, en juillet 2020, sur l’élaboration d’un instrument de relance (« Next Generation EU »), dont la principale composante est la « facilité pour la reprise et la résilience » (FRR), à hauteur de 724 milliards d’euros.
L’enveloppe de 724 milliards d’euros se répartit entre 386 milliards d’euros de prêts et 338 milliards d’euros de subventions. La clé d’allocation de celle-ci est séquencée en deux phases :
🔹70 % des crédits devront avoir été engagés en 2021 et 2022 ;
🔹les 30 % restants seront engagés en 2023, en remplaçant le critère du taux de chômage observé entre 2015 à 2019 par celui de la perte de PIB en 2020 et la perte de PIB cumulée entre 2020 et 2021, afin de mieux tenir compte des effets économiques de la crise sanitaire. Ce nouveau mode de calcul pourrait s’avérer défavorable à la France, eu égard à son PIB relativement stable en comparaison de ses voisins européens.
➡️ La FRR constitue un dispositif budgétaire innovant en raison de sa gouvernance spécifique. En effet, l’allocation des crédits de la FRR nécessite que les États membres présentent à la Commission européenne des plans nationaux détaillant leurs programmes de réformes et d’investissement pour les années 2021 à 2023 (le « plan national de relance et de résilience », PNRR). L’évaluation des plans est approuvée par le Conseil statuant à la majorité qualifiée après la proposition de la Commission européenne.
Le Parlement européen se fait toutefois régulièrement l’écho des critiques relatives aux marges d’appréciation dont dispose la Commission européenne pour analyser les PNRR qui lui sont soumis, ainsi qu’au manque de transparence dans ses échanges avec les Etats membres.
🇪🇺 Un versement des fonds lent et complexe au niveau européen, mais relativement avancé en France.
➡️ S’agissant du décaissement des crédits de la FRR, celui-ci s’étalera entre 2021 et 2026, au fur et à mesure de l’atteinte de cibles (« targets » quantitatives) et étapes clés (« milestones » qualitatives) figurant dans le plan national de chaque État membre. À ce jour, tous les plans nationaux de reprise et de résilience ont été validés par le Conseil, à l’exception de celui de la Hongrie, en raison des tensions liées au respect de l’État de droit dans le pays.
Néanmoins, seuls 113 milliards d’euros de subventions (80 Mds€) et de prêts (33 Mds€) de la FRR ont été déboursés à ce stade aux Etats membres dont les PNRR ont été validés. Plusieurs raisons expliquent la lenteur de ce processus. D’une part, les versements européens nécessitent la mise en place préalable d’un dispositif d’audit et de contrôle, qui peut être relativement lourd pour les Etats membres en termes de gestion. D’autre part, ce dispositif peut également être difficile à appliquer pour des administrations et des organismes peu habitués aux financements européens ou dotés de moyens moins importants.
➡️ La France, qui devrait bénéficier d’une enveloppe totale de 39,5 milliards d’euros courants au titre de la FRR, se trouve en deuxième position (derrière l’Espagne) au niveau de l’UE en termes de taux de décaissement. En août 2021, elle a ainsi pu bénéficier du premier versement, au titre du préfinancement, s’élevant à 5,1 milliards d’euros, suivi d’un premier paiement à hauteur de 7,4 milliards d’euros le 4 mars dernier, ce qui représente un total de 12,5 milliards d’euros versés (soit 32 % du total prévu). D’ici à la fin de l’année, un nouveau versement de 12,5 milliards d’euros devrait être effectué, avant trois nouveaux transferts en 2023, 2024 et 2025, pour des montants respectifs de 7 milliards, 3 milliards et 4 milliards d’euros.
🇪🇺 Les modalités de remboursement du plan européen de relance à compter de 2028 : une question toujours en suspens.
➡️ Afin de rembourser le plan de relance européen, à compter de 2028, les Etats membres ont demandé à la Commission européenne de présenter des propositions de nouvelles ressources propres, selon un calendrier précis :
🔹au cours du premier semestre 2021, et pour une application à compter du 1er janvier 2023, des propositions relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières et à une redevance numérique;
🔹sans échéance précise, une proposition éventuelle relative à un système révisé d’échange de quotas d’émission, et une taxe sur les transactions financières.
➡️ Ce calendrier initial n’a pas été tenu. Ce retard s’explique notamment par l’accord trouvé au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en octobre 2021 sur la taxation des multinationales, obligeant la Commission européenne à intégrer le contenu de cet accord pour définir ses futures ressources propres.
Fin décembre 2021, la Commission européenne a présenté trois nouvelles propositions, basées notamment sur les propositions législatives du paquet « Ajustement à l’objectif 55 » :
🔹une ressource fondée sur le système révisé de quotas d’émission. La Commission propose que 25 % des recettes issues du système révisé soit affecté au budget européen, et non plus exclusivement aux Etats membres. Ces recettes, qui s’élèveraient à 9 milliards d’euros par an entre 2026 et 2030, alimenteraient le fonds social pour le climat, et le remboursement du plan de relance européen ;
🔹une ressource fondée sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, qui représenterait 75 % des recettes générées, soit 1 milliard d’euros par an entre 2026 et 2030 ;
🔹une ressource fondée sur l’application, au sein de l’Union européenne, du pilier I du « cadre inclusif » de l’OCDE. En effet, la Commission européenne propose une ressource propre équivalent à 15 % de la part des bénéfices résiduels des entreprises relevant du champ d’application qui seront réaffectés aux Etats membres de l’Union européenne. Le montant de cette ressource pourrait s’élever entre 2 et 4,5 milliards d’euros par an, selon les estimations de la Commission européenne.
À ce jour, aucune proposition n’a été présentée s’agissant de la taxe sur les transactions financières.
➡️ La question des nouvelles ressources propres de l’UE se pose avec d’autant plus d’acuité que la possibilité d’un nouvel emprunt commun est désormais évoquée afin de faire face à la crise énergétique (cf. tribune de MM. Thierry Breton et Paolo Gentiloni dans Les Échos).
2️⃣ Le financement des mesures énergétiques et climatiques au niveau européen.
🇪🇺 Le pacte vert pour l’Europe :
➡️ Objectifs :
Fin 2019, la Commission européenne a proposé une série d’initiatives constituant le pacte vert pour l’Europe (« Green Deal »), dont l’objectif est d’assurer la neutralité climatique de l’Union d’ici à 2050.
En juillet 2021, la Commission européenne a parachevé le déploiement du pacte vert européen avec la présentation du « paquet » législatif intitulé « Ajustement à l’objectif 55 ». Ce paquet comporte une dizaine de propositions législatives, dont l’objectif est de réduire d’ici 2030 les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % par rapport à 1990, en vue d’accéder à la neutralité carbone d’ici 2050.
Si les propositions législatives traitent de secteurs variés – transport, énergie, agriculture, etc. –, leur objectif commun contribue au caractère interdépendant des différents textes.
➡️ Financement :
Parmi les divers textes législatifs proposés, les mesures suivantes ont dernièrement fait l’objet de nombreux débats :
🔹l’instauration du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, de façon progressive et symétrique à la montée du prix du carbone au sein de l’Union européenne, de façon à répondre au risque de « fuite » du carbone hors Union européenne. L’objectif est que les producteurs situés en dehors du territoire de l’Union européenne soient soumis aux mêmes contraintes liées au prix du carbone que ceux situés sur le territoire européen. La recherche de cette égalité de traitement constitue d’ailleurs un élément essentiel pour assurer la conformité du dispositif aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il convient de relever qu’à ce stade, l’utilisation des recettes générées par ce mécanisme, initialement fléchées pour le remboursement du plan de relance, n’est pas encore tranchée ;
🔹 la création d’un fonds social pour le climat de 72 milliards d’euros pour la période 2025-2032, que la Commission européenne propose de financer par l’affectation de 25 % des recettes générées par le nouveau système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (réduction progressive du nombre de quotas gratuits et mise en place d’un nouveau système appliqué aux secteurs du transport routier et de la construction à compter de 2026). Ce fonds vise à financer des mesures de soutien aux ménages les plus vulnérables, ainsi que des investissements « verts »dans les secteurs du transport routier et de la construction.
🇪🇺 Le plan « REPowerEU » :
➡️ Objectifs :
Présenté par la Commission européenne en mai dernier, le plan « REPowerEU » vise à rendre l’Europe indépendante des combustibles fossiles russes avant 2030, afin de tirer les conséquences de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. La Commission propose ainside faire passer de 40 % à 45 % l’objectif actuel de l’UE à l’horizon 2030 en matière d’énergies renouvelables, en portant la capacité totale de production européenne d’énergies renouvelables à 1 236 GW d’ici à 2030.
Pour parvenir à cet objectif, la Commission propose notamment :
🔹des achats communs de gaz, de gaz naturel liquéfiéet d’hydrogène par l’intermédiaire de la plateforme énergétique de l’UE (créée en avril 2022) pour tous les États membres qui souhaitent y participer, ainsi que pour l’Ukraine, la Moldavie, la Géorgie et les Balkans occidentaux ;
🔹le déploiement rapide de projets photovoltaïques et éoliens, combiné au déploiement de l’hydrogènerenouvelable afin de réduire de 50 milliards de m³ environ les importations de gaz ;
🔹de compléter par un volet « REPowerEU » les plans nationaux de relance au titre de la facilité pour la reprise et la résilience, pour un montant de 20 milliards d’euros (en subventions uniquement).
➡️ Financement :
Le plan « REPowerEU » représente un total d’investissements supplémentaires de 210 milliards d’euros. Pour financer ces investissements, la Commission propose :
🔹d’une part, d’utiliser une partie des prêts restants au titre de la FRR (225 milliards d’eurosactuellement) ;
🔹d’autre part, de financer de nouvelles subventions au titre de la FRR par la mise aux enchères, dans le cadre du système d’échange de quotas d’émissioncarbone, d’une partie des quotas actuellement mis de côté pour réguler les prix (« réserve de stabilité » du marché), à hauteur de 20 milliards d’euros. Par un vote du 3 octobre, les eurodéputés de la commission de l’Environnement – compétente au fond sur cette question – ont refusé l’utilisation de cette réserve pour financer de nouvelles subventions. Le texte, adopté par 48 voix contre 15, prévoit de trouver les 20 milliards d’euros prévus en avançant les enchères de quotas, initialement prévus pour être émis entre 2027 et 2030.
➡️ D’autres sources européennes de financement de « REPowerEU » sont également envisagées : fonds de la politique de cohésion, fonds européen agricole pour le développement rural, mécanisme pour l’interconnexion en Europe, fonds pour l’innovation, Banque européenne d’investissement, etc.
➡️ La Commission suggère enfin aux Etats membres d’envisager des mesures temporaires de taxation exceptionnelle des producteurs d’énergie. A cet égard, le règlement européen relatif aux mesures d’urgence pour faire face aux prix élevés de l’énergie a donné lieu à un accord politique du Conseil de l’Union européenne le 30 septembre 2022. Ce règlement prévoit notamment la création d’une contribution temporaire de solidarité applicable aux entreprises des secteurs du pétrole, du charbon, du raffinage et du gaz, ainsi que le plafonnement des revenus issus de la production d’électricité (à 180 euros / MWh).Ces mesures devraient être rapidement transcrites dans le droit français, par le biais de deux amendements déposés par le Gouvernement au projet de loi de finances pour 2023.

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