Commission sénatoriale d’enquête sur les cabinets de conseil : « Une influence tentaculaire sur la prise de décision ».

18 mars 2022
◼️ Le Sénat a conduit depuis 4 mois une importante mission d’enquête relative au recours aux cabinets de conseil par l’Etat dans le cadre de la crise sanitaire, mais aussi de manière plus large. Sous la Présidence de notre collègue Arnaud Bazin, et sous la responsabilité de la rapporteur, notre collègue Eliane Assassi, dont le groupe avait sollicité la mise en place de cette commission d’enquête, nous avons adopté de manière unanime le rapport d’enquête et les préconisations qui en sont issues. Tous les membres de la commission d’enquête, dont j’étais, quel que soit leur appartenance politique, ont en effet considéré que de graves dérives dans le recours aux cabinets conseil nécessitent des mesures fortes et ciblées.
◼️ Après 40 auditions, nous sommes parvenus à la conviction que le recours aux cabinets conseil dit quelque chose de notre vision de l’Etat, et plus encore l’augmentation massive de ce recours depuis 2018 nous inquiète. En 2021, celui-ci atteint plus d’un milliard d’euros et touche depuis 4 ans des secteurs aussi divers que la modification de la distribution de la propagande électorale, la réforme des APL, la gestion des radars…
◼️ La nature même de ces interventions dites « disruptives » interroge, tout comme l’absence ou la légèreté des livrables produits, de même que les modalités des accords cadre sur lesquels s’appuie la commande.
Renforcer la transparence et les règles déontologiques, tout comme l’accès aux données et leur sauvegarde, semblent particulièrement nécessaire. Pour preuve la circulaire produite en urgence par le Premier ministre en février dernier, pendant notre mission, pour tenter de « colmater la chose » mais sans réellement y apporter de réponse de fond.
◼️ L’influence avérée sur la décision publique de certains cabinets de conseil, via des « think tank », ou via des missions « pro bono », c’est-à-dire gracieuse, nécessite en particulier un encadrement fort et une exclusion totale de cette pratique de gratuité dont les finalités présentent une réelle difficulté quant à l’indépendance de la définition des politiques publiques.
◼️ Nos propositions visent ainsi à :
▪️Renforcer la transparence du recours aux Cabinets conseil (publication, traçabilité, information dans le bilan social…) ;
▪️Mieux encadrer le recours (rationalisation des accords-cadres, recours à la DITP dès les marchés de 150.000 €, réinternalisation de missions, renforcement de l’évaluation…) :
▪️Fixer des règles déontologiques fortes (contrôle de la HATVP sur les cabinets conseil, renforcement de certaines interdictions, mise en place d’un code de bonne conduite, renforcer les déclarations d’intérêts des cabinets, interdiction des missions pro-bono, confortation du mécénat encadré, nécessité d’utiliser des termes français accessibles à tous,…) ;
▪️Mieux protéger les données (destruction des données, gestion des systèmes d’information et de l’open data …).
◼️Par ailleurs, notre commission d’enquête a identifié une présomption d’évasion fiscale du Cabinet Mc Kinsey, dont un des dirigeants a menti lors des auditions, conduisant notre commission à prendre une initiative sur le plan judiciaire conformément à la loi suite à une déclaration mensongère.
◼️ Nous réaffirmons bien sûr que l’apport des cabinets conseil n’est pas à rejeter et qu’il peut être utile s’il est encadré, transparent, cantonné à un domaine déterminé et évalué. Pour autant, nous pensons que les ressources de l’Etat peuvent être mieux utilisées et que plusieurs missions peuvent être réinternalisées par respect et valorisation de la fonction publique française dont les compétences avérées doivent être mieux mobilisées.
◼️ Le contrôle parlementaire est essentiel à notre démocratie et cet épisode le montre encore. Une proposition de loi transpartisane suivra cette mission d’enquête afin de traduire dans la loi certaines de ces préconisations.
Comme Max Weber, « je n’ai jamais cru à la neutralité axiologique ». C’est pourquoi je me réjouis tout particulièrement des propositions visant à interdire le recours au pro bono par les cabinets de conseil.
◼️ Après la publication du livre « Les infiltrés », qui dénonce la dépendance de l’État aux cabinets de conseils, écrit par Caroline Michel-Aguirre et Matthieu Aron, grands reporters, qui proposait une enquête sur l’influence des cabinets de conseil au plus haut niveau de l’État, le travail du Sénat vient conforter et étayer bien des biais déjà identifiés et surtout proposer des réponses. L’exécutif ne pourra y être sourd.
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