Sans doute faudra-t-il que de vrais états généraux de la société française permettent d’aller vers une acceptation sociale de ce projet que l‘insuffisance de débat démocratique n’a pas permis lors de cette élection présidentielle.
Pour autant, nous devons entendre le double appel lancé par les électeurs et y répondre plutôt que de se réfugier dans des postures morales ou de jugement. Il y a dans notre pays un problème de représentation d’une majorité populaire. Il y a dans notre pays un problème de vision, de perspective, d’espérance, de sens, de transcendance. Notre responsabilité est d’y répondre, de construire des solutions collectives, sobres, volontaristes, réalistes, équitables, mais aussi ambitieuses.
Pour cela, je crois que nous devrions travailler, partager, au moins 3 orientations d’urgence pour la France.
Nous le voyons avec une acuité particulière depuis les crises que nous avons traversées, les questions de souveraineté doivent être repensées pour retrouver une autonomie d’action et disposer d’un socle clair nous permettant de construire une société. Je parle des souverainetés au pluriel car elles recouvrent en effet plusieurs volets aussi essentiels et complémentaires les uns que les autres : Défense et Affaires étrangères, Sécurité et Justice, Budget, Industrie, Agriculture, Santé, Culture. Cette question nécessite de définir un nouvel équilibre entre la Nation et l’Europe, pour bâtir une défense et une gestion de nos frontières empreintes de responsabilité, de lucidité et d’un nouveau protectionnisme indispensable à la nouvelle phase de mondialisation dans laquelle on s’engage. Notre politique monétaire et budgétaire, comme notre agriculture ou notre industrie ou la santé, doivent venir en soutien des personnes et des entreprises, grâce à la force de notre marché intérieur, pour sortir des risques de la dépendance extérieure. Notre culture, la francophonie, notre histoire et notre géographie qui font de nous un pays présent partout dans le monde, forment une richesse qui témoigne de notre humanisme et de notre ouverture. C’est précieux, c’est une promesse civilisationnelle que nous devons chérir et offrir en partage.
Nous sommes engagés dans des transitions nombreuses, indispensables, parfois inquiétantes, souvent mal maitrisées dans leur trajectoire, leur calendrier ou leurs impacts. J’en citerai au moins quatre que nous devons reconsidérer sans les ignorer. La transition économique est rendue nécessaire du fait d’une mondialisation et d’un capitalisme qui ne peuvent plus s’affranchir de règles, de régulation, d’une dimension protectionniste à l’échelle européenne et d’une dimension plus humaine. Celle-ci doit préserver nos savoir-faire, mais aussi notre bien-être et nous rendre autonome sur l’essentiel. Elle appelle à une meilleure répartition des richesses et à un rôle nouveau des organisations, des entreprises, dépassant le seul cadre de la profitabilité autour de la notion de raison d’être. La transition écologique ensuite. C’est une évidence qui doit être conciliée avec une soutenabilité et une acceptation responsable. Il s’agit à la fois d’être exemplaire sans être naïf. Il s’agit d’accompagner cette transition pour la rendre atteignable et soutenable. La transition énergétique est une composante à part entière qui relie les deux précédentes et qui doit être appréhendée en dehors de tout dogmatisme exacerbé. Elle renvoie à une nécessaire autonomie, mais aussi à une capacité à y avoir accès pour tous. Enfin, la transition sociale doit être partagée, accompagnée, et non subie comme c’est aujourd’hui trop le cas. En effet tout notre système de protection sociale, tout notre modèle social est interrogé. Pour durer, il doit se transformer et rester au service de tous mais avec un mode de financement et une gestion rénovée. Ainsi je pense en particulier que notre protection sociale ne peut plus autant peser sur le travail et que d’autres modalités de financement doivent être mises en place.
Toute activité, toute question est territorialisée, reliée à un territoire. Elle repose en effet sur des femmes et des hommes qui habitent, qui occupent ce territoire. L’efficacité passe par la proximité qu’il faut responsabiliser, libérer, autoriser, permettre. Ainsi les questions de santé, d’éducation, d’infrastructures, d’emplois, de services, de collectivités, si elles doivent s’appuyer sur un cadre de référence national, doivent surtout être appréhendées, mises en œuvre, pilotées, à un niveau local, de la Région à la Commune. C’est une condition majeure de retour à la confiance, à la prise en compte différenciée et simplifiée des problèmes de quotidien de chacun. Cela nécessite un changement de posture majeur : l’acception que la « pointe de la pyramide » n’ait pas réponse à tout !