LE POINT SUR … ZAN : Les 3 décrets d’application de la loi ZAN du 20 juillet 2023

22 décembre 2023

🏛️LE POINT SUR …
❗️ZAN❗️: Les 3 décrets d’application de la loi ZAN du 20 juillet 2023 ont été publiés, au JO du 28 novembre.

❗️Ceux-ci traduisent, par voie réglementaire, différentes dispositions que le Sénat avait accepté de voir supprimées de sa PPL. Les trois décrets concernent :
• La « nomenclature du ZAN » (définition des surfaces artificialisées ou non artificialisées) ;
• La territorialisation du ZAN via les SRADDET, l’avenir du bâti agricole et la prise en compte des spécificités des communes de montagne et littorales ;
• La composition et fonctionnement de la commission de conciliation Etat/région en cas de différend sur les propositions de la région pour la liste des grands projets nationaux.

1️⃣ Décret relatif à l’évaluation et au suivi de l’artificialisation des sols (nomenclature) :
👉Ce décret remplace la nomenclature précédemment adoptée par voie réglementaire, que l’AMF avait attaqué devant le Conseil d’Etat. Le Conseil d’Etat avait partiellement annulé le décret du 29 avril 2022.
👉Le nouveau décret du 27 novembre 2023 comporte une annexe particulièrement complexe, qui répertorie les surfaces considérées comme artificialisées ou non artificialisées. Des seuils s’appliquent en fonction des catégories.
👉Seront considérées comme artificialisées :
• Les surfaces de plus de 50m2 dont les sols sont imperméabilisés en raison du bâti ;
• Les surfaces végétalisées herbacées à usage résidentiel (i.e. les jardins privés) de plus de 2500m2, lorsque moins de 25% du couvert végétal est arboré ;
• Les surfaces de plus de 2500m2 en chantier ou à l’abandon.
👉Seront considérées comme non artificialisées :
• Les jardins publics de plus de 2500m2 ;
• Les surfaces de plus de 2500m2 naturelles, nues (sable, galets, roches, pierres, y compris les carrières) ou couvertes d’eau, de neige ou de glace, soit végétalisées, constituant un habitat naturel ou utilisées à usage de cultures, y compris les surfaces d’agriculture urbaine ;
• Les surfaces de plus de 2500m2 boisées ou arbustives dans l’espace urbain ;
• Les surfaces de plus de 2500m2 à usage de culture agricole qui ne sont pas des friches.

👉L’application des seuils conduit à opérer la distinction suivante :
🔜Jardins privés :
• Jardin privé de moins de 2500m2 : non artificialisé
• Jardin privé de plus de 2500m2 avec plus de 25% d’arboré : non artificialisé
• Jardin privé de plus de 2500m2 avec moins de 25% d’arboré : artificialisé
🔜Jardins publics :
• Jardin public de moins de 2500m2 : artificialisé
• Jardin public de plus de 2500m2 : non artificialisé

❗️Nous nous étions fortement battu pour tenter de limiter la fin du modèle pavillonnaire individuel. Les négociations avec le Gouvernement ont notamment permis d’obtenir que les jardins privés de moins de 2500m2 soient considérés comme non artificialisés et que les jardins privés de plus de 2500m2 avec plus de 25% de surfaces arborées soient également considérés comme non artificialisés.
Le pavillon individuel reste donc une solution possible mais encadrée.
En revanche, le Gouvernement maintient son souhait de considérer les jardins publics de moins de 2500m2 comme des surfaces artificialisées, car ceux-ci sont généralement présents au sein des espaces urbanisés.

2️⃣ Décret relatif à la mise en œuvre de la territorialisation des objectifs du ZAN.
👉Ce deuxième décret revient partiellement sur le décret du 29 avril 2022, attaqué par l’AMF devant le Conseil d’Etat, relatif à la territorialisation du SRADDET et donc la déclinaison du ZAN.

❗️Prise en compte des spécificités locales dans la déclinaison du ZAN :
Le nouveau décret complète, conformément à la loi ZAN de 2023, le contenu du rapport d’objectifs du SRADDET pour adapter la territorialisation du ZAN aux réalités locales :
• La déclinaison territoriale des objectifs du ZAN doit tenir compte des efforts passés des communes ;
• La déclinaison territoriale doit tenir compte des communes littorales exposées au recul du trait de côte ou des communes de montagne ;
• La déclinaison doit tenir compte des enjeux de maintien et de développement des activités agricoles ;
• La déclinaison doit enfin tenir compte des pôles urbains, du maillage des infrastructures et des enjeux de revitalisation et de désenclavement des territoires, notamment des communes rurales.

❗️Prise en compte du SRADDET dans l’élaboration des Les 3 décrets d’application de la loi ZAN du 20 juillet 2023 :
Le décret revient également sur les mesures, attaquées devant le Conseil d’Etat, de prescriptibilité du SRADDET.
Pour mémoire :
• La loi Climat-résilience, à l’initiative du Sénat, a prévu que le SRADDET ne devait fixer que les objectifs généraux de lutte contre l’artificialisation, (les objectifs généraux doivent être pris en compte par les documents infrarégionaux, et non compatibles). Le Sénat a également prévu une inscription optionnelle, dans le fascicule des SRADDET, de la territorialisation du ZAN (le fascicule doit, lui, être compatible avec les documents infrarégionaux). Selon la loi, les régions avaient ainsi le choix de rendre leurs objectifs contraignants ou non.
• Le décret du 29 avril 2022, est allé beaucoup plus loin que la loi, en prévoyant que la territorialisation du ZAN devait obligatoirement figurer dans le fascicule du SRADDET (et donc s’opposer aux documents d’urbanisme), avec des objectifs chiffrés d’artificialisation nette.
Le nouveau décret revient partiellement sur les dispositions décret de 2022, en prévoyant qu’au sein du fascicule du SRADDET, des règles différenciées avec des objectifs chiffrés d’artificialisation « peuvent être définis » afin d’assurer la déclinaison du ZAN.

👉Ainsi, les régions ne seront plus obligées d’inscrire des cibles chiffrées en hectares au niveau infrarégional, mais pourront se limiter à décrire une méthode de répartition. Mais, si les Régions choisissent de fixer des objectifs chiffrés dans leur SRADDET, alors ceux-ci s’imposeront dans un rapport de compatibilité avec les documents d’urbanisme locaux.
Ces dispositions remplacent la précédente rédaction qui disposait que des règles différenciées « permettent d’assurer » la déclinaison du ZAN, de façon contraignante.
Les régions auront ainsi le choix d’inscrire ou non dans le fascicule de leur SRADDET, des règles s’imposant aux documents d’urbanisme inférieurs (SCoT, PLU, carte communale).

👉Cette version est moins-disante que la PPL initialement déposée par Jean-Baptiste BLANC qui, dans son article 3, prévoyait au niveau législatif que « les règles relatives aux objectifs et trajectoires de réduction de l’artificialisation des sols dans les SRADDET s’appliquent aux SCoT, aux PLU(i) ou cartes communales dans un rapport de prise en compte et non de compatibilité ».
Le décret fait le choix de rester au niveau du fascicule, ce qui crée une ambiguïté. Il est certain que l’Etat cherche à ce que les SRADDET soient le plus normatif possible. La rédaction et l’application du décret sont donc ambigües et restent à évaluer.

❗️Territoires littoraux exposés au recul du trait de côte:
👉Le décret précise que, lorsque la région comporte des territoires littoraux, la déclinaison territoriale du ZAN doit permettre de favoriser les projets de recomposition spatiale des communes exposées au recul du trait de côte, pour réaliser les relocalisations nécessaires de constructions, d’ouvrages ou d’installations menacées par l’évolution du trait de côte.
👉Pour mémoire, la loi ZAN, en son article 5, précise les nouvelles règles de prise en compte du recul du trait de côte : « Pour l’atteinte de ces objectifs, les surfaces artificialisées situées dans une zone exposée au recul du trait de côte peuvent être considérées comme désartificialisées, dès lors que ces surfaces ont vocation à être renaturées dans le cadre d’un projet de recomposition spatiale du territoire littoral. Au terme de chaque tranche de dix années, les surfaces n’ayant pas fait l’objet d’une renaturation sont de nouveau considérées comme artificialisées. »

❗️Part réservée aux projets d’envergure régionale et aux constructions nécessaires à l’exploitation agricole.
👉Le décret reprend un article de la PPL sénatoriale, supprimé à la demande du Gouvernement. Il prévoit la possibilité de mutualiser la consommation ou l’artificialisation induite par certains projets d’envergure régionale, qui feront l’objet d’une liste dans le fascicule du SRADDET.
👉Le décret reprend également l’esprit de l’amendement adopté au Sénat, puis supprimé à l’Assemblée nationale. Il prévoit qu’une part d’artificialisation de sols pourra être réservée au niveau régional pour une liste de projets de construction ou d’extension d’installations nécessaires à l’exploitation agricole. Chaque région pourra réserver par avance une enveloppe destinée à ces projets.
👉La notice du décret précise : « Ce mécanisme permet de mieux prendre en compte cet enjeu après 2031. Pour la première tranche de dix ans (2021-2031), les constructions ou installations à destination d’exploitation agricole qui sont réalisées dans les espaces agricoles ou naturels n’emportent généralement pas de création ou d’extension d’espaces urbanisés et donc de consommation de ces espaces. »
👉Pour ces deux dispositifs (projets d’envergure régionale et bâti agricole), les listes établies seront transmises pour avis aux présidents d’EPCI, aux maires et aux Présidents de Conseil départemental. L’avis est réputé favorable s’il n’a pas été rendu dans le délai d’un mois.
👉Cette rédaction n’est pas satisfaisante et fait naître un doute sur l’avenir du bâti agricole après 2031. La seule solution proposée par le décret est de réserver une part de terrain au niveau régional d’ici à 2031. Il est à noter que le Ministère de l’Agriculture n’a pas été associé à la rédaction du décret.

​❗️Autorisations d’urbanismes et ZAN.
👉L’article 3 du décret précise qu’une autorisation d’urbanisme conforme aux prescriptions d’un document d’urbanisme en vigueur (SCoT, PLU(i)) qui aurait fixé des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols ne peut être refusée au motif qu’elle serait de nature à compromettre le respect de ces objectifs.
👉Le décret précise également qu’ « en particulier, une autorisation d’urbanisme relative à une construction ou installation nécessaire à une activité agricole ne saurait être refusée au seul motif que sa délivrance serait de nature à compromettre [l’atteinte des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols]. »
👉L’ajout de la mention « en particulier » a été fait à la demande de Matignon lors de l’élaboration du décret. Cette mention reste à apprécier dans la pratique, mais risque de créer de nombreux contentieux en droit de l’urbanisme.

3️⃣ Décret relatif à la composition et aux modalités de fonctionnement de la commission régionale de conciliation sur l’artificialisation des sols.
👉Le décret précise la composition et le fonctionnement de la commission de conciliation Etat/région. Pour mémoire, le Sénat a introduit dans la loi ZAN un forfait national de 12 500ha, permettant la comptabilisation spécifique des projets d’intérêt national (prisons, LGV, giga-factories, etc.).
👉Les projets retenus dans le forfait sont listés par le ministre, après avis du Président du Conseil régional et consultation de la conférence du ZAN (ex-conférence des SCoT).
👉La région peut, en outre, faire des propositions pour identifier un projet non retenu par le ministre. Si l’Etat est en désaccord avec l’ajout d’un projet retenu par la Région, une commission de conciliation intervient. C’est ce que le Sénat a obtenu lors de la CMP.
👉Les listes de grands projets sont en cours d’élaboration par les préfets et devraient pouvoir être évaluées rapidement.

👉Les décrets publiés reprennent en partie les positions du Sénat, mais présentent des limites ou des oublis majeurs :
➲ Le décret sur la nomenclature est complexe et ne permet pas de garantir totalement l’avenir de la France pavillonnaire ;
➲ Les règles de prescriptibilité du SRADDET sont moins-disantes que les propositions du Sénat, et la faculté des régions de prévoir des SRADDET prescriptifs demeure inscrite au sein du fascicule ;
➲ Le fonctionnement de la commission de conciliation Etat/région ne permet pas à la région d’imposer un projet sur la liste dérogatoire de 12 500ha consacrée aux projets nationaux ;
➲ Les décrets ne reprennent pas la proposition sénatoriale de laisser aux élus la liberté de densifier le foncier dans un périmètre précis (périmètre de densification du foncier de la PPL sénatoriale) ;
➲ Les décrets ne traduisent pas non plus les dispositions de la PPL du Sénat sur le « compter à part intercommunal ».

❗️Le Gouvernement a publié un guide synthétique sur le ZAN à l’adresse suivante : https://artificialisation.developpement-durable.gouv.fr/sites/artificialisation/files/fichiers/2023/11/ZAN%20DP%2027nov23_VF.pdf

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