Le texte initié par Philippe Mouiller, Corinne Imbert et Bruno Rojouan, avec le soutien du ministre de la santé Yannick Neuder est assez largement partagé au Sénat devrait aboutir même si certains amendements peuvent encore l’améliorer.
– piloter la politique d’accès aux soins au plus près des territoires ;
– renforcer l’offre de soins dans les territoires les plus fragiles ;
– libérer du temps médical et favoriser les partages de compétences.
L’article 1er conforte la compétence des conseils départementaux dans la promotion de l’accès aux soins, compétence affirmée par la loi « 3DS » sans portée concrète à l’époque. Il est ainsi proposé de donner la possibilité aux départements de mener une mission d’évaluation des besoins de santé sur le territoire, à l’appui des données mises à disposition par les agences régionales de santé (ARS), les caisses d’assurance maladie (CPAM) ou encore les ordres.
L’article 1er vise également à créer un « office national d’évaluation » ayant vocation à remplacer l’actuel Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS).
Le rôle des offices départementaux a été renforcé en prévoyant que l’identification des zones « sous-denses » ou « sur-denses » en professionnels ne pourra être réalisée par le directeur général de l’ARS qu’après avis conforme des offices départementaux concernés.
Par ailleurs, ce zonage sera désormais revu annuellement pour mieux l’adapter à l’évolution rapide des besoins de santé.
L’office national d’évaluation de la démographie des professions de santé devra présenter un bilan annuel des besoins identifiés en profession de santé sur le territoire, ce dernier sera rendu public.
Le champ des acteurs devant mettre à disposition les données nécessaires à l’exercice des missions de l’office d’évaluation est élargi à l’ensemble des administrations de l’État ainsi qu’aux collectivités territoriales et leurs établissements publics concernés.
La composition du conseil d’administration des ARS a été modifiée : chaque Département d’une région devra être représenté au Conseil d’administration de l’ARS.
L’article 2 inscrit dans les organes de pilotage et de définition de la politique de santé un comité de pilotage, comprenant les principaux acteurs de l’offre de soins et des représentants des collectivités locales. Ce comité devra proposer des actions de déclinaison territoriale de la politique de santé permettant la prise en compte des besoins spécifiques à certains territoires.
Les représentants des intercommunalités sont intégrés dans la composition de ce comité de pilotage.
Le présent article conditionne l’installation des médecins libéraux à une autorisation préalable qui serait conditionnée, pour les médecins généralistes, exerçant en zone sur-dense, à un engagement d’exercice à temps partiel en zone sous-dense.
S’agissant des spécialistes, cette autorisation serait conditionnée, en zone sur-dense, à la cessation concomitante d’activité d’un médecin de la même spécialité exerçant dans la même zone.
Cependant cette condition ne s’appliquerait pas dans les deux cas suivants :
– Lorsque le médecin spécialiste s’engage à exercer à temps partiel dans une zone caractérisée par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins ;
– À titre exceptionnel et sur décision motivée du directeur général de l’agence régionale de santé, lorsque l’installation est nécessaire pour maintenir l’accès aux soins dans le territoire.
L’article consacre, dans la loi, le principe d’une activité secondaire pour les professions médicales, en dehors du lieu habituel d’exercice et simplifie l’exercice en cabinet secondaire.
Il vise ainsi à faciliter l’exercice en cabinet secondaire pour les médecins, en réduisant de deux à un mois le délai minimal entre la déclaration d’ouverture d’un cabinet secondaire et le début d’activité, et en supprimant, pour les médecins généralistes, la possibilité pour le conseil départemental de l’ordre compétent de s’opposer à l’ouverture d’un cabinet secondaire pour des motifs tirés d’une méconnaissance de l’obligation de continuité des soins.
Pour les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes, l’activité secondaire est subordonnée à une autorisation préalable du conseil départemental de l’ordre compétent.
Le conseil départemental de l’ordre dans le ressort duquel se situe une activité secondaire envisagée pourra émettre un avis sur l’établissement de l’activité en cabinet secondaire. Cet avis peut permettre à l’ordre de communiquer ses réserves sur l’ouverture d’un cabinet secondaire, sans aller jusqu’à s’y opposer, afin d’avertir le médecin sur la nécessité de prendre des mesures nécessaires au respect de ses obligations déontologiques.
L’article propose, dans le cadre de la convention médicale, de fixer des tarifs spécifiques des honoraires applicables dans tout ou partie des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins.
Pour faciliter le remplacement des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages femmes qui s’absentent pour concourir à l’accès aux soins dans des territoires caractérisés par une offre de soins sous-dense – par exemple, pour participer à l’activité d’un service d’accueil des urgences (SAU) en établissement de santé –, l’article prévoit que le remplacement est, par principe, de droit, et qu’il ne peut être refusé, par le conseil départemental de l’ordre compétent, que pour un motif impérieux.
Le présent article est inspiré par l’Association Médecins Solidaires qui s’appuie sur l’engagement d’un collectif de médecins généralistes.
Huit centres de santé ont été créés (parfois des maisons médicales restées vides) dans des territoires où l’offre médicale était insuffisante voire inexistante. Ces centres sont dans les départements suivants : Haute-Vienne, Cher, Creuse (2), Nièvre, Deux-Sèvres, Indre, Lot et Garonne.
L’article propose une expérimentation visant à autoriser le recours aux contrats de travail à durée déterminée (CDD) dans des conditions dérogeant au droit du travail.
La participation des centres de santé à l’expérimentation est subordonnée à la délivrance préalable d’une autorisation par le directeur de l’agence régionale de santé. Cette condition permet de sécuriser le cadre de l’expérimentation en limitant le nombre de centres de santé autorisés à pratiquer des dérogations au droit du travail, sur la base notamment du projet de santé qu’ils présenteront.
L’expérimentation, qui vise principalement les centres médicaux et pluriprofessionnels, doit faciliter l’installation de nouveaux centres de santé dans des territoires dépourvus d’offre de soins et a vocation à s’appliquer à certains centres de santé existants.
Actuellement, ni la loi ni la réglementation ne prévoient les conditions dans lesquelles est fixé le nombre maximum de praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) susceptibles d’être reçus aux épreuves anonymes de vérification des connaissances (EVC).
Cet article vise donc à fixer ces critères directement dans la loi. Il est ainsi prévu que le nombre de places tienne compte des capacités de formation dans chaque région, des besoins exprimés par les structures agréées pour l’accueil des candidats, et de la démographie de chaque profession et chaque spécialité.
Article 9 : Simplifier le dispositif d’autorisation d’exercice des Padhue.
Le présent article vise à supprimer l’avis de la commission nationale qui statue sur l’autorisation individuelle d’exercice des Padhue après leur réussite aux épreuves anonymes de vérification des connaissances (EVC) et après la réalisation du parcours de consolidation des compétences.
Ainsi lorsque le Padhue est affecté dans un établissement de santé pour la réalisation de son parcours de consolidation des compétences, l’avis de cette commission est remplacé par les avis du chef de service, du chef de pôle et du président de la commission médicale d’établissement.
En cas d’avis défavorable de l’une de ces autorités, une commission nationale est saisie pour décider de la prolongation éventuelle du parcours de consolidation des compétences ; de même, lorsque les Padhue sont affectés dans un établissement social ou médico-social ou dans une structure d’exercice coordonné en ville, c’est cette commission qui est saisie pour rendre un avis sur l’autorisation d’exercice et décider de l’éventuelle prolongation du PCC, compte tenu de l’impossibilité de solliciter l’avis de plusieurs autorités médicales.
En cas d’avis unanimement favorables des autorités précitées, ou lorsque la commission nationale ne s’est pas prononcée pour une prolongation du parcours de consolidation des compétences, l’autorisation individuelle d’exercice est délivrée dans un délai maximal de quatre mois.
Le présent article est libellé de telle sorte qu’il évite le risque de conflit d’intérêt qui pourrait naître d’une évaluation uniquement locale des compétences du Padhue au sein de son établissement d’affectation.
En conséquence, il est prévu de maintenir l’avis de la commission nationale d’autorisation d’exercice pour l’ensemble des Padhue lauréats des EVC. En revanche, les autorités médicales locales peuvent décider, conjointement, de saisir la commission nationale avant la fin du stage d’évaluation, pour qu’elle statue de façon anticipée sur l’autorisation d’exercice du candidat Padhue. Le délai à compter duquel les autorités locales pourraient saisir la commission nationale serait fixé par décret.
Par ailleurs, est ajouté, parmi les avis des autorités locales, celui du coordonnateur local de la spécialité pour renforcer la supervision universitaire du Padhue et mieux accompagner son parcours. En parallèle, dans un souci de simplification, l’avis du président de la commission médicale d’établissement est supprimé.
Enfin, en cas de silence gardé par l’autorité compétente dans un délai de quatre mois pour délivrer l’autorisation d’exercice, le silence vaut accord.
La loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels, dite loi « Valletoux », a élargi les structures d’accueil des Padhue en prévoyant que le parcours de consolidation des compétences puisse être réalisé dans les centres de santé et les maisons de santé.
Afin d’améliorer l’accès aux soins sur tous les territoires, le présent article prévoit que les Padhue affectés dans l’une de ces structures d’exercice coordonné pour la réalisation de leur parcours de consolidation des compétences le soient en priorité dans les zones de sous-densité médicale.
L’article entend favoriser le développement des coopérations entre professionnels de santé. Il inscrit le développement de ces coopérations dans les missions des structures d’exercice coordonné.
L’article fait figurer dans les missions des pharmaciens d’officine celle de contribuer à l’évaluation et à la prise en charge de situations cliniques simples, ainsi qu’à l’orientation du patient.
L’arrêté du ministre de la santé, pris après avis de la Haute Autorité de santé, devra définir les modalités de prise en charge par le pharmacien d’officine des situations cliniques qu’il listera.
Il est précisé que la prise en charge, par le pharmacien, de ces cas cliniques devra se faire en lien avec le médecin traitant.
L’article vise à favoriser l’accès à la pratique avancée par un maintien partiel des revenus des infirmiers lors de la période de formation, afin de lever un frein à l’entrée en formation.
L’article propose de revaloriser la rémunération des IPA pour l’ensemble des patients suivis par ces derniers en complément des forfaits existants pour les patients suivis régulièrement.
L’article entend favoriser l’accès des cabinets médicaux à des équipements innovants pour améliorer l’accès aux soins.
Il est précisé que l’aide à l’équipement des médecins doit être centrée sur les équipements et logiciels innovants, sur lesquels les dispositifs d’accompagnement existants apparaissent moins opérants.
Le présent article modifie l’article L. 231-2 du code du sport pour appliquer aux majeurs la solution jusque-là retenue pour les seuls mineurs : désormais, la délivrance ou le renouvellement d’une licence sera subordonnée au renseignement d’un questionnaire relatif à l’état de santé du sportif. Ce n’est que lorsqu’une réponse à ce questionnaire conduit à un examen médical que la délivrance ou le renouvellement de licence nécessitera la production d’un certificat médical.
Cet article ne fait pas obstacle à l’application de l’article L. 231-2-3 du code du sport, prévoyant que pour certaines disciplines présentant des contraintes particulières, énumérées par décret, la délivrance ou le renouvellement de la licence ainsi que la participation à des compétitions sont soumis à la production d’un certificat médical datant de moins d’un an.
Afin de libérer du temps médical, cet article vise à remplacer par une attestation sur l’honneur le certificat médical aujourd’hui requis pour qu’un salarié puisse bénéficier du congé pour enfant malade, limité par la loi à trois jours par an non rémunérés ni indemnisés.
L’article prévoit la présentation par le Gouvernement, chaque année, devant les commissions des affaires sociales et de l’aménagement du territoire et du développement durable, des résultats de l’action menée en faveur de l’accès aux soins.
Considérant que la transmission, chaque année par le Gouvernement, d’un rapport sur les actions menées en vue de réduire les inégalités sociales et territoriales en matière d’accès aux soins constituerait un élément important de l’amélioration de l’information du Parlement et des citoyens, nous avons inscrit dans la loi le fait que ce rapport devra être rendu public.
Dans le cas où ce rapport ne serait pas publié, il reviendra au Gouvernement d’assumer alors publiquement son impossibilité à présenter devant le Parlement et les citoyens le bilan de sa politique en matière d’amélioration de l’accès au soin de la population.
Il est pour moi la dernière opportunité de proposer des solutions concertées et responsables avant de franchir le cap de la contrainte qui serait certes une remise en cause profonde de notre système, mais à laquelle nous ne pourrons échapper si nous échouons car nous ne pouvons laisser 6 millions de Français sans accès aux soins.
D’autres volets liés à la sécurité des professionnels de santé et à la formation sont aussi en cours d’examen pour compléter les réponses apportées à une des premières préoccupations de nos concitoyens et d’inégalité sur nos territoires.



