Après Trump-Poutine, l’Europe dernier recours…

18 août 2025

🇺🇸🇷🇺🇺🇦🇪🇺Après Trump-Poutine, l’Europe dernier recours…

❗️On craignait que le sommet d’Anchorage fût une répétition de celui de Munich en 1938. Le sort d’un pays (la Tchécoslovaquie hier, l’Ukraine aujourd’hui) aurait pu être scellé en son absence. Tel n’a pas été le cas. Mais le titre d’une comédie légère de Shakespeare « Beaucoup de bruit pour rien » (Much Ado about Nothing) ne suffit pas à rendre compte de la signification de ce sommet. Anchorage constitue de fait une quadruple confirmation de ce que l’on savait : la clarté des intentions de Poutine, le caractère imprévisible et non digne de confiance de Trump, la fragilité de la position de l’Ukraine, et enfin le rôle clé qui revient désormais à l’Europe… mais en a-t-elle vraiment les moyens ?

❗️L’excès de confiance de Poutine en lui-même a peut-être permis à l’Ukraine (et au-delà à l’Europe) d’éviter le pire. Mais pour combien de temps ? La Russie continue d’avancer sur le terrain militaire en Ukraine. Poutine est convaincu (et plus encore depuis le sommet d’Anchorage) de la supériorité psychologique et intellectuelle qui est la sienne sur Trump (à moins que le second ne soit, comme le suggèrent certains, « tenu » par le premier ?).

❗️En Alaska, le maître du Kremlin, n’était prêt à aucune concession sérieuse, pas même à un cessez-le-feu partiel. « Le medium est le message » c’était le titre d’un livre publié par le sociologue canadien, Marshall McLuhan, en 1967. Pour Poutine, l’essentiel a été le médium, le cadeau royal que lui a fait Trump en le recevant « chez lui » en Amérique. Cette initiative unilatérale ne pouvait-elle approfondir les tensions déjà existantes entre les partisans de la fermeté et de la clarté face à Moscou et ceux prêts à un compromis à tout prix ? Pourquoi faire de réelles concessions à Trump si le temps joue en faveur de la Russie ? Parce que l’Ukraine épuisée, acculée et de plus en plus isolée, devra accepter un compromis encore plus humiliant pour elle demain ?

❗️Soyons clairs, Poutine et Trump sont unis par un commun mépris de l’Europe. Pour le maître du Kremlin, avec l’Union européenne comme « ultime rempart », Kiev ne pourra que revenir dans le giron de Moscou d’une manière ou d’une autre. Et si l’Europe n’est aux yeux de Poutine qu’un détail de l’histoire, l’Amérique de Donald Trump est presque parfaite dorénavant dans le rôle « d’idiot utile » qui semble de plus en plus être le sien. Incarnée par Steve Witkoff, qui a préparé le sommet d’Anchorage, la diplomatie américaine est en train de devenir à la diplomatie, pour plagier Clemenceau, ce que la musique militaire est à la musique. Après les péripéties de ces derniers jours, aussi tristes que ridicules, il convient de revenir à l’essentiel, qui lui n’a pas changé. Les positions de Moscou et de Kiev sont irréconciliables, puisque ce que la Russie exige de l’Ukraine n’est rien moins que sa disparition en tant qu’état souverain et indépendant. Or, si la Russie absorbe l’Ukraine (après avoir digéré la Biélorussie), elle deviendra un « corps trop grand » pour l’équilibre européen. Ce que veut Moscou est donc inacceptable pour une Europe qui se retrouve, du fait des changements intervenus en Amérique, en première ligne.

❗️L’Europe a de facto hérité de la position de la « tare ». Alors que la balance penche toujours davantage du côté de la Russie, il appartient à l’Union, par son aide militaire, économique, diplomatique, psychologique à l’Ukraine, et ses sanctions renforcées à l’encontre de la Russie, de redresser un équilibre qui connaît une évolution négative. Et de contraindre ainsi Poutine à accepter un compromis véritable qui passe par un cessez-le-feu et une trêve à long terme. L’Europe est-elle capable en dépit de ses nuances (le mot différences serait plus juste) de parvenir à jouer ce rôle ? Il n’existe pas d’alternatives hélas. L’Europe est devenue la puissance (mais en est-elle vraiment une?) de dernier recours. Personne ne sauvera l’Ukraine si les Européens se résignent à sa chute.

❗️Confronté à l’obsession ukrainienne de Poutine, et la souveraine indifférence de Trump, la voie est étroite pour l’Europe. Il lui appartient de répondre présente (ou non ?) à ce défi central. Le plus important sans doute, par ses possibles conséquences géopolitiques, de tous les défis auxquels elle a été confrontée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

❗️Après Anchorage, c’est de facto un deuxième sommet qui va être improvisé ce lundi à la Maison-Blanche entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky, escorté par une demi-douzaine de dirigeants européens. Il n’en fallait pas moins pour délibérer sur les conséquences des retrouvailles effusives en Alaska entre les présidents américain et russe. Avant peut-être un troisième sommet avec Vladimir Poutine, souhaité par Trump dès vendredi prochain, mais dont le Kremlin n’a pas encore accepté le principe. Au milieu de cette fébrilité diplomatique, le président russe procède avec méthode. Relégués au rang de « soutiens » plus ou moins indéfectibles, mais qui assurent désormais la majorité de l’aide militaire à l’Ukraine, les pays européens marchent sur une corde raide. Ils sont partagés entre la volonté de maintenir la pression sur Moscou – l’UE annonce travailler à un dix-neuvième paquet de sanctions contre le régime, prévu pour septembre – et le souci de ne pas froisser Donald Trump en paraissant s’opposer trop ouvertement à ses efforts de paix, sans faire trop de concessions à Vladimir Poutine.


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