FOCUS : Taxe « Zucman » : pourquoi je n’ai pas voté la création de ce nouvel impôt sur les « ultra-riches »

15 juin 2025
🎱 FOCUS : Taxe « Zucman » : pourquoi je n’ai pas voté la création de ce nouvel impôt sur les « ultra-riches », alors même que nous devons rendre plus efficace notre fiscalité en même temps que nous devons baisser la dépense publique.
🔜 Le Sénat a dit non, par 188 voix contre 129, ce jeudi 12 juin, à l’instauration de la taxe « Zucman », un impôt plancher sur les patrimoines de plus de 100 millions d’euros. J’ai voté contre cette proposition de loi, alors même que je pense qu’il faut, en parallèle de la baisse de la dépense publique, trouver les moyens de faire davantage contribuer les plus hauts revenus à l’effort national.
🔜 Le dispositif proposé, appelé « taxe Zucman », du nom de l’économiste qui l’a inspiré, a été voté à l’Assemblée nationale le 20 février, avec une faible mobilisation dans l’hémicycle, et donc rejeté par le Sénat cette semaine. Pourquoi ?
🔜 Les soutiens du texte, essentiellement à gauche, estiment que cette taxe pourrait rapporter jusqu’à 20 milliards d’euros, quand le gouvernement recherche 40 milliards d’euros d’économies dans le prochain budget. Notons d’abord qu’il ne s’agirait pas d’économies mais de fiscalité supplémentaire Nuance … Pour autant, rien n’est moins sûr quant au rendement de cette impôt car les risques d’évasion fiscale sont fortes si cette taxe n’est que française. Inversement, ses détracteurs, dont je suis, brandissent le risque d’exil fiscal justement, l’impact d’un tel dispositif sur l’investissement et l’emploi, et plus encore l’inefficacité du dispositif qui confond le patrimoine de l’entreprise et celui du chef d’entreprise, tout comme plus largement le patrimoine et le revenu, ce qui le rendrait confiscatoire et inefficace.
🔜 D’abord, rappelons que la France possède une double exception mondiale. C’est à la fois le pays qui travaille le moins et qui pourtant organise le plus de transferts sociaux via la dépense sociale, et c’est celui qui possède déjà le plus haut niveau de prélèvement obligatoire. La priorité doit donc d’abord être de baisser la dépense publique, ce qui n’empêche pas de réfléchir à des modifications au sein du périmètre fiscal existant pour opérer des transferts afin d’avoir des impôts plus efficaces, c’est en effet d’abord ce que l’on demande à la fiscalité. Ces rentrées fiscales efficaces permettant ensuite de redistribuer pour assurer une juste solidarité. Donc d’abord ne confondons pas tout et ne faisons pas de la fiscalité ni « l’alpha et l’oméga » de l’égalité, ni un symbole idéologique. Elle est d’abord là pour financer de manière efficace la dépense publique.
Nous devons donc veiller à la stabilité fiscale pour donner de la visibilité à tous, individus comme entreprises, et pour favoriser l’écosystème qui permet aux investisseurs, aux entrepreneurs et aux talents de créer de l’emploi et de la richesse en France, pour pouvoir ensuite la redistribuer. Ainsi, la nouvelle contribution proposée serait à la fois confiscatoire et inefficace comme je l’ai déjà dit.
🔜 Cet impôt présenterait en outre beaucoup trop de faiblesses d’ordre constitutionnelles, opérationnelles ou économiques. En l’absence de plafond, cette taxe risquerait d’être considérée comme confiscatoire par le Conseil constitutionnel, car l’on ne peut pas raisonnablement soutenir cet impôt qui promet cinq fois plus de rendement que l’impôt sur la fortune (ISF), concentré sur 1 800 personnes, là où l’ISF frappait 350 000 contribuables.
Cet impôt présenterait aussi une forte faiblesse économique puisqu’il confond le patrimoine, en agrégeant en outre patrimoine de l’entreprise et patrimoine privé, et le revenu. Ainsi, les dirigeants d’une jeune entreprise comme Mistral par exemple, notre champion français de l’IA, dont la valeur de l’action est conséquente mais qui ne gagne pas encore d’argent, seraient obligés de vendre leurs actions pour payer leur impôt. Une aberration économique absolue qui organiserait un vrai déménagement de nos pépites, de nos richesses, de nos entreprises, ce qui nous priverait ensuite de toute capacité de redistribution sociale.
🔜 En revanche, nous devons absolument limiter et encadrer les effets de l’optimisation fiscale.
L’un des objectifs de la proposition de loi, était en effet de mettre fin aux effets d’évitement qui frappent les plus hautes tranches d’imposition, dans la mesure où certaines grandes fortunes organisent leurs revenus pour échapper aux pressions fiscales. À cette fin, le texte proposait d’agréger à la fois le patrimoine privé et le patrimoine professionnel pour construire un impôt plancher des « ultra-riches », soit un peu moins de 2 000 personnes en France selon les critères retenus. Si la finalité est bonne, le moyen d’y parvenir est mauvais et surtout la confusion qu’elle génère mettrait en péril notre économie, déjà vacillante.
🔜 Mais en effet, il faut prendre en compte le fait qu’en 1985, les 1 % les plus riches de ce pays détenaient 16 % de la richesse nationale, aujourd’hui ils en détiennent un quart. Cette situation n’est plus soutenable, mais on ne peut la corriger de cette manière. Il faut en effet se méfier des propositions simplistes, pour ne pas dire populistes, et au contraire proposer des systèmes pour protéger l’emploi et l’investissement dans nos territoires. Dire que l’on va résoudre les problèmes des plus pauvres en taxant les plus riches, c’est monter les Français les uns contre les autres. Mais c’est surtout inefficace.
🔜 En dépit de fortes divergences méthodologiques, il convient pourtant de renforcer l’égalité devant l’impôt, dans un souci d’efficacité et d’acceptation. Certaines situations marginales de suroptimisation qui peuvent nuire à l’efficacité de l’impôt, doivent être combattues pour imposer un niveau d’impôt sur le revenu équitable à la charge des plus fortunés. Il nous revient de nous assurer que les contribuables qui utilisent des mécanismes légaux pour contourner l’impôt ne puissent plus le faire. Voilà ce qui devra figurer dans le prochain PLF, plutôt que l’idéologique et populiste taxe Zucman qui n’aurait pour finalité que d’appauvrir le pays et donc au final les plus pauvres qui bénéficient de la solidarité nationale.
🔜 Enfin, je rejoins ici Emmanuel Faber, l’ex patron de Danone, qui fait valoir que c’est d’abord à chacun de repenser son rapport à l’argent et cela de manière urgente. Aujourd’hui 1% de la population mondiale détient plus que la moitié de l’humanité et la moitié de l’humanité ne détient que 1% des richesses mondiales. Ces inégalités sont « criantes », en ce sens qu’elles crient vraiment. Elles érodent nos démocraties et nos économies. Pour continuer à vivre ensemble, c’est maintenant qu’il faut agir. Et agir, ça veut dire tout le monde. Donc ça commence par chacun, par moi. Il faut donc modifier la rétribution des dirigeants dans l’entreprise, à la fois à l’échelle individuelle et à l’échelle mondiale, un pays isolément ne peut le faire sauf à se condamner. L’âpreté au gain continue à faire tourner la finance qui confère un pouvoir désormais dangereux pour le reste du monde. Nous devons chacun distinguer ce qui est nécessaire et ce qui superflu, c’est un discernement vital pour l’hygiène de chacun, de son rapport au pouvoir, et pour la salubrité de l’économie.
Si nous devons conserver l’économie de marché, « le pire système à l’exception de tous les autres », celle-ci doit revenir à la source de sa légitimité, qui est « oikonomia » : la gestion de notre demeure commune.
Elle doit donc s’inscrire dans une légitimité plus large. Cette économie n’est plus possible si elle n’est pas conditionnée par la régénération des « communs » par ceux qui s’en sont appropriés l’usage. Recycler les excès monétaires, que ce soit par les niveaux de rémunérations des grands dirigeants ou par la fiscalité, y contribue.
Voilà ce à quoi on doit s’atteler par l’exemple des entreprises à mission, en encourageant aussi la prise de risque et l’innovation, par l’émergence de fondations et de fonds souverains à la française, par une fiscalité juste et efficace à l’échelle nationale, et par la création d’une ONG mondiale pour la croissance inclusive initiée par les plus grands dirigeants.
C’est seulement dans le collectif et bien souvent hors des structures étatistes que les choses bougent, l’Etat ne faisant ensuite que les accompagner.
Les institutions ne se changent pas elle-mêmes ; ce sont les personnes qui les transforment. Si le débat ouvert par Gabriel Zucman va y contribuer, les réponses demandent à être tisser de manière non idéologiques mais efficaces pour tous.

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