đŸ”Č Dialogues de Bercy : prĂ©paration du PLF 2023.

14 septembre 2022
🔘 Dans le contexte inĂ©dit que nous connaissons, tant du point de vue politique avec une absence de majoritĂ© absolue, qu’en termes de crises internationales, le MinistĂšre des Finances a proposĂ© aux bureaux des deux commissions des finances de l’AssemblĂ©e et du SĂ©nat, une sĂ©rie de rencontres de concertation et de dialogue en amont de la prĂ©sentation du Projet de loi de finances (PLF) 2023 en Conseil des Ministres et de son dĂ©pĂŽt au Parlement.
En fait, trois textes seront présentés simultanément : le PLF, le PLFSS (projet de loi de finances de la sécurité sociale) et la loi de programmation des finances publiques (pour les 5 ans qui viennent).
J’ai assistĂ© cet aprĂšs midi Ă  la premiĂšre des 4 rĂ©unions prĂ©vues sur le sujet consacrĂ©e au cadre macro-Ă©conomique dans lequel s’inscrit le PLF. Nous aborderons ensuite les dĂ©penses, puis les recettes (qui restent dynamiques en particulier au niveau de l’import de les sociĂ©tĂ©s confirmant qu’un bon impĂŽt est un impĂŽt Ă  assiette large et Ă  taux limitĂ©), avant une sĂ©ance conclusive.
Si on peut saluer la mĂ©thode qui permet d’anticiper l’approche du PLF, il n’est pas certain que cela permette d’influer sur son contenu. Nous aurons l’occasion de le faire lors de son examen au cours de l’automne au Senat.
Aux cĂŽtĂ©s de Jean-François Husson, rapporteur gĂ©nĂ©ral du budget, et de Christine Lavarde, whip de la commission des finances, mais aussi de mon collĂšgue Bernard Delcros (Ă©galement membre du bureau de la commission), nous avons entendu les prĂ©sentations des Ministres Bruno Le Maire et Gabriel Attal, avant d’intervenir dans le dĂ©bat.
🔘 La France rĂ©siste plutĂŽt mieux que d’autres dans le contexte que nous connaissons mais au prix d’un effort public consĂ©quentpour protĂ©ger les français qui a dĂ©gradĂ© nos finances publiques et qui ne pourra pas ĂȘtre prolongĂ©. L’acquis de croissance 2022 s’établit Ă  2,5%, mais dĂ©jĂ  les risques d’une rĂ©cession effective aux Etats-Unis et Ă  venir en Allemagne, s’ajoutant aux difficultĂ©s d’approvisionnement en Chine, nous rattrapent. Pourtant le budget 2023 est construit sur une croissance ramenĂ©e de 1,3 Ă  1% et une hypothĂšse d’inflation de 4% en 2023. Elle est de 5,3% en 2022, contre plus de 8% si le bouclier tarifaire qui a coĂ»tĂ© plus de 50 milliards d’euros n’avait pas Ă©tĂ© mis en place.
L’objectif demeure de maintenir le dĂ©ficit public Ă  5% du PIB pour garder la trajectoire sur laquelle le pays est engagĂ©. En consĂ©quence, la suppression de la CVAE se fera en deux ans (23 et 24) et non en une seule fois. Ce serait d’abord la part dĂ©partementale qui serait supprimĂ©e. La hausse des dĂ©penses publiques est limitĂ©e Ă  0,6% en affichage. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point lors de la prochaine sĂ©ance.
Ces objectifs renvoient aussi Ă  la rĂ©forme engagĂ©e de l’allocation chĂŽmage et Ă  la rĂ©forme de la retraite, sans que la moindre prĂ©cision n’ait Ă©tĂ© donnĂ©e Ă  ce stade ni sur la portĂ©e, ni sur le calendrier, ni sur les modalitĂ©s.
🔘 Les orientations prĂ©vues pour 2023 intĂšgrent ainsi un retrait du soutien aux prix du carburant Ă  partir de janvier, au regard d’un prix du baril qui sera sous les 100$, et une augmentation des prix du gaz et de l’électricitĂ© dans un niveau contenu Ă  partir du 1re janvier 2023 pour se rapprocher de la rĂ©alitĂ© des cours et ne maintenir des mesures de soutien en faveur des plus fragiles. Les personnes n’ayant pas d’alternative de dĂ©placement, en milieu rural par exemple, doivent pouvoir continuer Ă  trouver des rĂ©ponses ciblĂ©es.
🔘 La question de la dette, sur laquelle je suis notamment intervenue, reste une inquiĂ©tude majeure. Les taux d’intĂ©rĂȘt, aprĂšs une premiĂšre hausse des taux directeurs de la BCE de 0,75 points, qui en appelle d’autres, sont anticipĂ©s Ă  1,8% en 2022 et 2,5% Ă  2,6 % en 2023, avec un maintien du spread (Ă©cart avec l’Allemagne). La charge de la dette serait de 51 milliards d’euros en 2023 (contre 36 au PLF 2022), ce qui n’est sans doute pas encore un niveau suffisamment anticipĂ©.
🔘 Si la France a mieux amorti le choc en protĂ©geant les français, face Ă  une crise du gaz comparable au choc pĂ©trolier de 1973 (la charge pour un foyer se chauffant au gaz aurait Ă©tĂ© supĂ©rieure de 2200 € en moyenne et de 1450 € pour celui se chauffant Ă  l’électricitĂ©), cela n’aurait pas Ă©tĂ© supportable pour beaucoup, il convient dĂ©sormais de trouver d’autres rĂ©ponses Ă  la fois responsabilisantes (le ministre a voulu se montrer rassurant quand au fait de pouvoir passer l’hiver sans difficultĂ©s majeures, sauf situation extrĂȘme).
Les pistes de travail portent dĂ©sormais sur la reconduction d’un bouclier gaz et Ă©lectricitĂ©, mais Ă  un niveau plus Ă©levĂ©, donc avec un coĂ»t plus consĂ©quent pour les mĂ©nages, le maintien de la TICFE et un dispositif exceptionnel pour les mĂ©nages modestes.
🔘 Parmi les points que nous avons fait valoir devant trouver des solutions dans le PLF d’ici fin dĂ©cembre figurent les Ă©lĂ©ments principaux qui suivent .
â–ȘMise en place d’un dispositif fiscal permettant de rĂ©cupĂ©rer « l’argent des rentes » des Ă©nergĂ©ticiens (et non taxe sur les superprofits des entreprises) dont les modalitĂ©s pourraient ĂȘtre europĂ©ennes, validĂ©e par le Gouvernement.
â–ȘMise en place d’un mĂ©canisme de compensation de la perte de la CVAE pour les collectivitĂ©s Ă  partir d’une fraction de TVA et mĂ©canisme de territorialisation pour maintenir un lien au territoire, sans doute selon les bases de la CFE. À dĂ©battre encore

â–ȘLa rĂ©vision des valeurs locatives commerciales sera sans doute renvoyĂ©e au delĂ  de 2023, tant ses effets « pervers » semblent chaque jour plus Ă©vident. Cela pose plus largement la question de la rĂ©vision des valeurs locatives sur les rĂ©sidences particuliĂšres devant intervenir d’ici 2026. La question de la fiscalitĂ© locale devra ĂȘtre reposĂ©e.
â–ȘLa refonte du taux d’usure pour faciliter le crĂ©dit immobilier est engagĂ©e et doit trĂšs vite aboutir. Si cela permet un recours plus aisĂ© au crĂ©dit, aujourd’hui particuliĂšrement bloquĂ© et mettant en danger tout le secteur de l’immobilier, cela aura une consĂ©quence Ă  la hausse sur le prix du crĂ©dit. L’accroissement des moyens pour la rĂ©novation Ă©nergĂ©tique, mais avec une dĂ©marche globale qui ne traiterait pas que des ouvrants, est en dĂ©bat.
â–ȘLes mesures d’accompagnement pour les entreprises sont assouplies jusqu’à la fin de l’annĂ©e. Celles qui consacrent 3% de leur chiffre d’affaires Ă  l’énergie, qui ont une baisse de bĂ©nĂ©fice sur un mois et une facture d’énergie qui a doublĂ©, pourront en bĂ©nĂ©ficier. PrĂ©sentation dĂ©taillĂ©e Ă  venir.
â–ȘPour ce qui concerne les collectivitĂ©s territoriales, il convient d’abord de noter que le relĂšvement des bases des valeurs locatives sera bien maintenu Ă  hauteur de 6% environ pour 2023 et ne sera pas capĂ©. ïżŒAucune rĂ©duction d’enveloppe des dotations n’est dĂ©sormais prĂ©vue les concernant, mais un objectif de rĂ©gression des dĂ©penses sur 5 ans de -0,5%, comme pour l’Etat, soit une volontĂ© de maĂźtrise de la dĂ©pense. L’indexation de la DGF sur l’inflation n’est pas proposĂ©e par le Gouvernement mais la question reviendra lors des dĂ©bats. Nous avons soulignĂ© que la situation des collectivitĂ©s Ă©tait hĂ©tĂ©rogĂšne et qu’il fallait prĂ©voir des dispositifs pour les plus fragiles. Nous aurons des propositions Ă  faire en la matiĂšre mais la perspective de l’application du tarif rĂ©glementĂ© de l’électricitĂ© aux collectivitĂ©s sera un combat, d’autant plus qu’à ce stade celui-ci doit disparaĂźtre en juillet 2023. D’autres mesures seront traitĂ©es lors des prochains rendez-vous.
â–ȘLa question des relations avec l’UE quant au programme de stabilitĂ© de la France que le Haut conseil aux finances publiques avaient jugĂ© « alĂ©atoire » reste d’actualitĂ© dans la perspective du nouveau pacte europĂ©en. Celui-ci peut en outre conditionner, comme je l’ai soulignĂ©, le soutien de l’UE Ă  nos grands investissements ferroviaires par exemple, dont nous avons tant besoin. Plus largement nous devrons examiner comment renforcer notre effort d’investissement.
â–ȘSi le Gouvernement semble attachĂ© Ă  maintenir les trajectoires sur lesquelles il s’est engagĂ© tant au niveau des finances publiques que de la transition Ă©cologique, la question du rythme et de l’accompagnement des plus Ă©loignĂ©s pour en permettre la soutenabilitĂ© et l’acceptabilitĂ© est clairement posĂ©e.
â–ȘL’objectif de rĂ©duction de la dĂ©pense publique reste limitĂ©, alors qu’en dehors de la CVAE, aucune baisse d’impĂŽt ne semble Ă  ce stade prĂ©vue, mĂȘme si on nous promet un toilettage des niches fiscales qu’il ne faudra pas faire aveuglĂ©ment. De sorte que la question de la sincĂ©ritĂ© de ce budget risque encore de se poser comme en 2022.
â–ȘNous aurons aussi dĂšs octobre un dĂ©bat sur la politique Ă©nergĂ©tique qui va s’avĂ©rer crucial et impactant pour les finances de tous.
🔘 L’exercice de l’élaboration de ce PLF est difficile. Il l’est d’autant plus que la situation de nos finances publiques est dĂ©gradĂ©e et que ni Bruxelles, ni surtout les marchĂ©s financiers, ne permettent de ne pas se conformer Ă  une trajectoire pourtant encore peu ambitieuse de rĂ©duction de la dĂ©pense publique, mais en tendance incontournable. Nous aurons Ă  dĂ©battre des choix possibles en la matiĂšre pour Ă  la fois rĂ©pondre Ă  cet enjeu, prĂ©server nos services publics et notre amĂ©nagement du territore, assurer la nĂ©cessaire solidaritĂ© en faveur des plus fragiles, valoriser davantage encore le travail et moderniser le financement de notre systĂšme public et en particulier de notre protection sociale, dans un souci d’efficacitĂ© et de justice.
🔘 Rendez-vous pour les prochaines sĂ©ances de ces Dialogues de Bercy, avec sans doute un travail plus approfondi, avant le dĂ©bat au Parlement pour parvenir Ă  un projet responsable, ambitieux et solidaires.

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