Où va la France?
… pour paraphraser l’ouvrage d’Edgar Morin : « Où va le monde …

9 juillet 2024

⚫️ Où va la France?
… pour paraphraser l’ouvrage d’Edgar Morin : « Où va le monde ? ».
Ou « L’impasse » pour reprendre le titre de La Tribune dimanche !

🔜 Le casse-tête issu de la ­dissolution est une équation à plusieurs inconnues. L’éclatement des sièges à l’Assemblée Nationale est inédit depuis la IVeme République. L’absence de majorité absolue au sein de la nouvelle ­Assemblée nationale est claire. Chacune des trois alliances, y compris le Nouveau Front populaire, en est loin et tout attelage alternatif paraît bien théorique. L’absence de toute figure ayant l’autorité ou la légitimité suffisantes pour imposer ne serait-ce qu’une méthode ou un calendrier pour sortir de la crise politique s’ajoute à la difficulté. Le Président de la République a loupé son pari et a précipité notre pays dans l’inconnue.

🔜 Le Président de la République a encore, en théorie, la légitimité institutionnelle pour prendre une initiative. C’est à lui, et à lui seul, que la Constitution confère le droit de nommer le premier ministre. Mais qui se soucie vraiment de son avis ? Pas la gauche qui, forte de l’efficacité électorale, ne veut rien négocier avec lui et tout lui imposer : le nom du chef du gouvernement et l’action à mettre en œuvre. Pas les siens non plus qui, de Gabriel Attal à Yaël Braun-Pivet, d’Édouard Philippe à Gérald Darmanin, n’entendent pas lui laisser la main dans la recomposition du paysage. Les autres sont bien silencieux…
Pourtant nul doute qu’il soit à la manœuvre. La macronie continue prétendre pouvoir élargir le centre vers la social-démocratie pour s’adjoindre des élus de bonne volonté au service du pays. Venant de ceux qui ont, pendant deux ans, traité par le mépris tous les scénarios de pacte de gouvernement avec une partie de la droite, l’hypothèse d’une coalition avec la gauche fait grincer des dents. D’autres plus large encore, allant des socio-démocrates à la droite, semblent aussi exister. Mais avec quel projet?

🔜 Sous le rapport de force des uns ou la prise de distances des autres, il y a surtout bel et bien une bascule institutionnelle. C’est à la nouvelle assemblée élue de faire émerger sa solution, laquelle ne pourrait être qu’acceptée par le chef de l’État.
Nous restons obsédés par le fait majoritaire qui est notre pratique alors que cette élection nous a projeté dans un système de type proportionnel qui nécessite de bâtir des programmes de gouvernement, et non d’imposer la vision (enfin quand elle existe) de chacun.
En admettant même que le verdict des urnes impose une lecture intégralement parlementaire et aucunement présidentielle de la Constitution de 1958, la question de la capacité à trouver une solution reste tout entière posée. Sinon elle sera imposée. Et dans tous les cas, l’instabilité est au rendez-vous, risquant de mettre la France à genoux, alors que les enjeux économiques et financiers qui nous attendent sont majeurs et que nous devrons arrêter le budget de la France dès la rentrée.

🔜 La gauche parade en triomphe depuis dimanche soir. Il est vrai qu’elle a créé la surprise, y compris pour elle-même, en décrochant cette première place. Mais il est plus juste de dire que le NFP est arrivé en tête que dire qu’il a gagné les législatives. À l’appui de ce constat, il suffit de relire ce que ses propres dirigeants répétaient depuis deux ans à propos de la majorité relative des macronistes. Avec 259 députés « seulement », ils étaient ravalés au rang de simple « minorité présidentielle ». Sans majorité absolue, ils n’auraient pas reçu de mandat pour mettre en œuvre leur programme à eux. Et là, avec quelque 180 députés, l’intégralité du pouvoir devrait leur revenir sans discussion ? Ils auraient le droit de mettre en œuvre dès ce mois de juillet toutes leurs propositions ? Et chacun sait que la durée de vie du NFP est limitée puisqu’en son sein même tout le monde n’est pas sur la même longueur d’onde, et surtout que la ligne LFI n’est acceptable pour personne ou presque.

🔜 Trop de candidats au poste d’architecte en chef d’une nouvelle majorité n’est pas une garantie de la solidité de l’édifice à construire. Celui-ci est loin d’être en vue. Voilà pourquoi Emmanuel Macron a choisi de se donner du temps. Mais sans solution en perspective, se donner du temps ressemble à une fuite en avant. Il devra très vite accepter la démission du gouvernement en place, quitte à ce qu’il gère les affaires courantes jusqu’au terme des Jeux Olympiques, ce qui arrangerait en fait tout le monde, sauf certains ministres qui veulent rejoindre le Parlement pour y peser.

🔜 La réalité, c’est que la France va connaître des semaines (et peut-être des mois) d’indécision. La réalité, c’est que, pour reprendre le mot d’un ancien Premier ministre honnête avec les faits, « pour battre le Rassemblement national, les Français ont voté pour des gens qu’ils ne veulent pas au pouvoir ». La réalité, c’est qu’en dépit de tout, le RN est aujourd’hui le premier parti politique de France, en voix et en sièges. De loin. Et qu’il est, lui, dans son meilleur rôle : attendre dans l’opposition. Il n’est pas sur qu’il loupe la marche la prochaine fois, surtout si nous n’agissons pas pour enfin apporter les réponses du quotidien.
La France est aujourd’hui plus éclatée que jamais et bien malade. La question d’une nouvelle répartition des pouvoirs, d’un nouveau modèle institutionnel, est plus que jamais d’actualité.

🔜 Ce soir devant le Cercle des élus locaux, Bruno Jeudi, Rédacteur en chef de « La Tribune dimanche » et Christophe Borgel, ancien député aujourd’hui analyste politique, mais aussi Hervé Marseille, Président du Groupe UC au Sénat, ont partagé leur lecture du scrutin législatif et des suites possibles. « L’impasse » est le mot qui revient le plus, mais aussi l’espoir d’un appel à la responsabilité pour tenter d’en sortir et éviter le pire pour notre pays dans l’attente des futurs rendez-vous électoraux.

🔜 Et je conclus donc par un extrait de l’essai d’Edgar Morin que j’ai paraphrasé pour mon titre, dans lequel il écrit :
💬 « Michelet avait imaginé que les baleines, pour s’accoupler, devaient s’élancer dans les airs verticalement et se projeter l’une vers l’autre, de sorte qu’en un éclair, par chance, le sexe du mâle pénètre celui de la femelle et lui lance sa semence. Que d’efforts infructueux, inlassables avaient donc besoin les baleines de Michelet pour se reproduire. L’action politique est à l’image de ce mythe. Elle nécessite des ardeurs répétées, des essais/erreurs ininterrompus, jusqu’à ce qu’un jour, par chance, la fécondation s’opère. […] l’accomplissement aveugle d’une fonction venue du fond des âges et qui va vers l’horizon des temps. »
💬 Et d’ajouter : « Nous sommes dans un devenir où la crise nous apparaît, non comme un accident dans nos sociétés, mais comme leur mode d’être. »





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