
Matthieu Pigasse, ancien collaborateurs de plusieurs ministres de l’Économie et des finances, ancien directeur général délégué de la banque Lazard en France et vice-président de Lazard en Europe, dirige, depuis 2020, le bureau parisien de la banque d’investissement américaine Centerview3.
Il est également propriétaire des festivals Rock en Seine et Golden Coast ainsi que des Nouvelles Éditions indépendantes (qui contrôlent le magazine Les Inrockuptibles et la radio Radio Nova) dont il est président. Il est actionnaire du groupe de presse Le Monde, du journal Le Huffington Post et du label Rough Trade.
Il était l’invité de notre rendez-vous mensuel grâce aux liens qui l’unissent à notre collègue Cédric Perrin.

Il est notamment l’auteur d’un livre décapant : « La Lumière du chaos », dans lequel il déclare : « On est dans une situation inquiétante, sombre, ce que j’appelle le chaos. Mais je suis convaincu qu’on peut y trouver la lumière ». « On est en train de vivre une situation, une transition inédite, par son ampleur et sa vitesse. Le chaos, c’est quand un système sort d’un état d’équilibre et devient instable et que les chocs s’auto-amplifient », souligne-t-il, estimant que le capitalisme est un système « à bout de souffle ».

Il défend une position iconoclastes sur la dette mais qui mérite d’être examinée et qui pourrait, peut-être, être une solution disruptive. Il a l’expérience d’avoir géré l’apurement des dettes de la Grèce et de l’Argentine, intervient aujourd’hui auprès de plusieurs pays d’Afrique et d’Amérique du Sud. « Que voulez-vous faire face à cette dette, être prisonniers des politiques d’austérité et rester les bras ballants face à ça ? Non. Est-ce qu’il est possible de faire quelque chose ? Oui. Une partie importante de la dette publique est détenue par la BCE et la Banque de France », estime-t-il. « Elle pourrait très facilement être annulée, sans aucun effet négatif économique ou financier. La seule chose qu’on constaterait serait une perte de la Banque centrale, soit des fonds propres négatifs. Et alors ? »
Il va bien falloir chercher des solutions hors du cadre au vu de notre situation et de nos besoins…

Refusant de se résigner, Matthieu Pigasse lance un appel à l’action, à la fois immédiate et globale, individuelle et collective. Assumer d’être soi pour retrouver le sens d’être ensemble. Il signe ainsi un plaidoyer pressant à ne pas renoncer, à prendre le contrôle de sa vie, et à découvrir en soi la lumière nécessaire pour s’affirmer sans peur et s’investir pleinement dans la collectivité. Il nous convie à imaginer une société du possible : une société ouverte où chacun peut se définir librement, une société de partage et de justice. Une société qui donne du sens à notre existence, refusant toute aliénation. Une société qui permet à chacun de se réaliser et de vivre debout, libre et digne.

Merci pour ce débat vivifiant qui permet d’ouvrir des champs nouveaux comme « Le Hibou » le permet. Le débat assume des différences et des divergences, pour lequel il nous a livré son message de « l’urgence européenne » face au retour de la géopolitique, qui confirme une régionalisation et la fin de la globalisation, et qui montre aussi que la seule préoccupation du consommateur et du dogme de la concurrence ne sont plus tenables. La dimension stratégique est plus que jamais d’actualité pour faire face, par delà les périls et les défis affichés que nous offrent la Russie, la Chine et les États-Unis, à la montée du « Sud global ». La peur panique du déclassement (collectif et individuel) qui nous assaille n’est guère favorable à un rebond. Pourtant la souffrance d’aujourd’hui et l’angoisse de demain qui ne font que nourrir les extrêmes, l’exigent.

Merci à Matthieu Pigasse pour cet échange très libre qui nous a aussi permis de nous glisser dans les coulisses du pouvoir et de certains grands rendez
Antoine Lefèvrey à l’Elysee, du « en même temps » qu’il juge mortifère pour la démocratie au règlement des dettes de la Grèce et de l’Argentine … dans un esprit très « rock and roll ».
Merci enfin à notre questeur Antoine Lefèvre qui nous a accueilli pour l’occasion.